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vendredi, mai 3, 2024

Documents exclusifs. Comment le député milliardaire Abdelmalek Sahraoui dissimule ses milliards au fisc algérien

Algérie Part a obtenu de nouveaux documents exclusifs au cours de ses investigations qui démontrent toute l’ampleur de la fraude fiscale à laquelle s’adonne le député milliardaire du FLN de la wilaya de Mascara Abdelmalek Sahraoui, l’un des derniers oligarques algériens de l’ère Bouteflika encore protégé et « immunisé » contre les poursuites judiciaires enclenchées par la guerre contre la corruption ayant débuté en Algérie depuis le Hirak du 22 février 2019. 

Signalons, d’abord, que le député Abdelmalek Sahraoui jouit encore et toujours de l’immunité parlementaire et le département du ministre de la Justice Belkacem Zeghmati n’a jamais demandé officiellement la levée de cette immunité parlementaire pour le traduire devant les tribunaux en dépit de son implication avérée et prouvée par plusieurs enquêtes d’Algérie Part dans de gros scandales de corruption et de détournements de deniers publics. La justice algérienne préfère pourchasser l’opposant Mohsin Bellabas, le leader du parti RCD, au lieu de s’intéresser à ce député milliardaire dont la fortune est estimée, du point de vue de la valeur de ses actifs financiers et immobiliers, à plus d’un milliard de dollars.

Cette impunité dont jouit depuis le début du Hirak Abdelmalek Sahraoui lui permet de tenter d’effacer les traces de ces combines maffieuses. Nous y reviendrons car il faut, d’abord, expliquer les tenants et aboutissants de ce nouveau scandale. Pour renforcer son enrichissement personnel et agrandir son pouvoir d’influence sur la vie politique et économique du pays, Abdelmalek Sahraoui a développé un mécanisme sournois qui consiste à dissimuler des bénéfices et des revenus de plusieurs milliards de Da au fisc algérien, à savoir les services des impôts, afin de ne pas les verser au Trésor Public et de continuer à les fructifier dans ses diverses affaires.

Comment est-ce possible ? Abdelmalek Sahraoui a créé, entre 2011 et 2018, de nombreuses sociétés situées un peu partout à travers l’Algérie. Chaque filiale facture ses services aux autres filiales, ce qui permet de déplacer les bénéfices et de les voiler pour ne pas les verser aux services des impôts et au Trésor Public. Personne au sein de l’administration fiscale algérienne n’a pris le soin de vérifier sur le terrain la légalité de ces facturations de services pour vérifier si les marchés dont elle font l’objet ont été réellement accomplies ou réalisés sur le terrain.

Oui, il n’y a aucune garantie s’agissant de la réalisation effective de ces marchés ou prestations de services car il s’agit là d’une technique fiscale bien rodée qui consiste pour Abdelmalek Sahraoui à utiliser ses différentes et innombrables entreprises pour procéder à des prestations à d’autres entités dont il est toujours actionnaire et ce dans le seul but de diminuer l’imposition globale. Il s’agit là d’un mécanisme d’évasion fiscale qui permet à une entreprise d’Abdelmalek Sahraoui de revendre de la marchandise ou des services à une autre de ses multiples entreprises pour faire croire au fisc algérien qu’il n’a fait aucune marge bénéficiaire et ne paie donc aucun impôt sur les bénéfices. Les profits sont alors concentrés artificiellement dans ce réseau d’entreprises dont les actionnaires sont toujours Abdelmalek Sahraoui et les membres de sa famille.

Prenons un exemple concret. Nous avons obtenu au cours de nos investigations des documents exclusifs qui portent sur les transactions financières effectuées entre deux sociétés acquises très discrètement par le milliardaire Abdelmalek Sahraoui. Il s’agit de POLYTRAV S.P.A et ALLIOR. La première est spécialisée dans les Travaux de bâtiment tous corps d’état et elle est située dans la zone industrielle de la Route de Khessibia à Mascara, le berceau d’Abdelmalek Sahraoui où il a développé toutes ses affaires les plus juteuses, et illicites, avec la complicité des autorités locales. ALLIOR est une entreprise privée basée à Oran et qui s’est développée à Alger en remportant également plusieurs marchés dans le bâtiment et travaux publics notamment auprès du ministère des Finances où elle avait procédé au revêtement façade en verre de certaines structures appartenant à ce département ministériel.

Abdelmalek Sahraoui rachète la majorité des parts de cette entreprise privée pour l’utiliser comme sous-traitant de sa première société POLYTRAV S.P.A. Une sous-traitance qui permet à Abdelmalek Sahraoui de faire passer plusieurs chèques prétextant le paiement de plusieurs factures de diverses prestations. Pour ne pas pas éveiller les soupçons des services des impôts, Abdelmalek Sahraoui inverse régulièrement les rôles et utilise ALLIOR pour verser des chèques à POLYTRAV comme le démontrent les documents en notre possession.

Ce vaste trafic fiscal prend des allures de pratiques totalement légales. Or, dans la réalité il s’agit d’un montage vicieux qui cause un énorme préjudice aux recettes fiscales de l’Etat algérien. En effet, « l’objectif » recherché par Abdelmalek Sahraoui consiste à établir des factures, soit pour des prestations effectuées réellement mais à l’ordre des entreprises dont il est lui même l’un des actionnaires ou le principal actionnaire, soit pour des opérations imaginaires et/ou pour des quantités ne correspondant pas aux livraisons effectives. Le but de cette manœuvre est de comptabiliser « scrupuleusement » ces factures fictives ou de complaisance en vue de minorer ses bénéfices imposables au titre de l’impôt sur les sociétés ou de l’impôt sur le revenu et de récupérer indûment la TVA facturée.

Cette technique, les fiscalistes l’appellent la « facture taxi » qui porte sur une transaction établie par une autre personne étrangère à l’opération effectuée, en l’occurence l’actionnaire soigneusement cachée dans les statuts des deux entreprises liées par ces marchés comme c’est le cas du milliardaire Abdelmalek Sahraoui.  Les sommes dégagées servent alors à alimenter une caisse noire ou sont directement appréhendées par le député milliardaire du FLN de la wilaya de Mascara.

Le président Tebboune a exprimé récemment son intention de « criminaliser l’évasion fiscale », en érigeant le non-paiement des impôts au rang de « crime économique ».
Lors de son discours prononcé ce dimanche 16 février, à l’occasion de l’ouverture des travaux de la réunion gouvernement-Walis au Palais des nations à Alger, le président de la République Abdelmadjid Tebboune a annoncé sa volonté de lutter contre tous types de fraudes, en criminalisant notamment l’évasion fiscale. « Il va y avoir une loi qui va criminaliser l’évasion fiscale. Comme aux États-Unis et dans d’autres pays à travers le monde. Celui qui ne paiera pas ses impôts sera passible de crime économique », a affirmé Tebboune, soulignant que cette loi s’ajouterait au droit pénal. Les intentions sont louables, mais dans la réalité, les auteurs de ces fraudes jouissent toujours de l’impunité et Abdelmalek Sahraoui en est la parfaite illustration.

 

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