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vendredi, mai 3, 2024

Décryptage. La genèse et les véritables origines de l’actuel fiasco économique algérien

Caractérisée par une étatisation à outrance, l’économie algérienne a continué a être fondée sur l’idée que l’Etat est le régulateur des activités économiques tout en dressant des barrières à l’implication du secteur privé, notamment étranger, dissuade par une réglementation excessive et tatillonne. La bureaucratie y est omniprésente et elle est aggravée par l’instabilité juridique et les velléités de retour aux modes de gestion révolus des années 1970 à l’image de l’octroi d’autorisations administratives préalables à toute opération d’importation et l’instauration du credit documentaire comme seul mode de paiement des importations ont, à titre d’exemple, englouti les avoirs financiers des entreprises industrielles et réduit considérablement leurs capacités d’importation de matières premières.

D’ailleurs, en l’absence d’un véritable marché de sous-traitance, capable de fournir les usines en pièces fabriquées en Algérie, l’activité industrielle est réduite à l’assemblage ou plutôt au « remontage » de matériel militaire à partir des kits « CKD » (completely knocked down, soit des pièces « complètement démontées ») et « SKD » (semi knocked down, pièces « partiellement démontées »). Cette politique de montage a ouvert la voie à de nombreux abus, tels des importations « déguisées », des transferts illicites d’argent à l’étranger ou des surfacturations pour gonfler les prix de revient des produits industriels faits en Algérie.

En dépit d’une précoce déconfiture de l’économie, amplement révélée par le choc pétrolier de 1985-1986, et de l’inefficacité du secteur public industriel algérien, des facilites de caisse ont continue a être accordées aux entreprises en difficulté, afin qu’elles puissent continuer à verser les salaires, en attendant une fin de crise jamais atteinte. D’ailleurs en l’absence d’un traitement rationnel du chômage, la solution visait à maintenir une masse salariale pléthorique dans les entreprises et les administrations sur fond d’une préservation du mythe d’une présumée industrialisation interdisant de toucher aux symboles que représentaient les grands complexes industriels.

En effet, contrairement à l’Ex-URSS qui avait les moyens de ses ambitions autarciques, l’Algérie s’est rapidement asphyxiée du fait de son exiguïté naturelle et de l’étroitesse de ses perspectives puisque les entreprises algériennes, largement dépendantes des importations pour leurs équipements et leurs intrants, ont vu leur production surdimensionnée par rapport aux besoins locaux. Leur faible degré de maitrise technologique et d’autonomie par rapport aux concepteurs étrangers font qu’ils étaient, inéluctablement peu concurrentiels a l’international et seul le secteur très instable des hydrocarbures a pu être tourné vers l’exportation.

Héritière d’une économie dévastée par une prédation coloniale sans fin, l’Algérie qui s’est émancipée sur les décombres d’une industrie inadaptée et sans perspective et d’une agriculture totalement dédiée à la consommation française (principalement vinicole), a vite cru bon de prioriser sur une mise à profit d’importantes ressources en hydrocarbures pour amorcer, dans un désordre populiste, un vaste programme d’investissements dans des industries placées sous la tutelle exclusive de l’Etat et consacrées à un marché intérieur aligné sur un modele soviétique d’autarcie pourtant totalement inadapté.

La dernière tentative en date, du gouvernement algérien de reformer les entreprises publiques industrielles, fut le plan annonce par l’ex-ministre de l’industrie Ferhat Ait Ali Braham visant à céder toute entreprise publique défaillante, s’activant dans l’industrie lourde, à l’ANP. Conformément à cette approche, la « société nationale des véhicules industriels » (SNVI) de Rouiba a été intégrée à l’industrie militaire.

La supervision politique des opérations essentielles qui déterminent l’activité des grandes entreprises ont, en outre, conduit à un véritable verrouillage des activités économiques.

Dans cet ensemble d’instruments de contrôle de l’entrepreneuriat, émerge le « conseil national de l’investissement » (CNI) qui est un dispositif clé brimant l’essor de l’entreprise privée. Cet organe donne son aval et décide des avantages accordes pour les investissements supérieurs à 05 milliards de DA (environ 36 millions d’euros). Le pouvoir politique peut ainsi réaliser un suivi rapproché du financement privé et agir pour limiter son rythme d’évolution global ou écarter des entrepreneurs récalcitrants ou politiquement peu « loyaux ».

L’ex-ministre de l’énergie Abdelmajid Attar avait appelé, récemment, à « repenser le modèle de l’emploi en Algérie » afin de permettre aux grands groupes économiques publics de fonctionner selon les normes de management en vigueur dans leurs domaines d’activité. Se plaignant de la pléthore d’effectifs au sein de la « Sonatrach », ce ministre algérien a avancé que le groupe « Sonatrach », qui emploie plus de 180.000 personnes, n’est pas compétitif en raison d’un excès d’effectifs, avant de dénoncer l’utilisation de cette société nationale comme instrument de réduction du taux de chômage.

Les déboires subis par l’industrie automobile algérienne, lancée en 2012, illustrent clairement les limites de cette politique. Des 2017, ce secteur s’est retrouve au cœur de la controverse. Les autorités avaient dénoncé des importations déguisées et ont dépêché une commission d’enquête chez « Hyundai » après la diffusion d’images sur les réseaux sociaux de modèles importes et sur lesquels il ne restait qu’à monter les roues. L’importation de pièces détachées destinées aux usines de montage a été alors interdite, avant que cette décision ne sonne le glas de cette jeune industrie. En décembre 2019, « Volkswagen » a suspendu sine die sa production, faute de pièces, et mis au chômage technique 700 salaries. En mai 2020, c’est la filiale algérienne du sud-coréen « KIA » qui a fermé sa chaine de montage, mettant au chômage 1 200 employés.

Les pouvoirs publics peuvent, également, entraver l’activité des entreprises en leur refusant les licences d’importation pour l’acquisition de matériel ou tout simplement en bloquant la marchandise à son arrivée dans les ports du pays. Cette mesure avait été prise contre la plus grande société algérienne, le groupe agroalimentaire Cevital. Issad Redrab (PDG de Cevital), connu pour son opposition politique à Bouteflika puis Gaid Salah, rencontrait régulièrement des difficultés administratives pour mener à bien ses investissements (cas du blocage en 2017, sur l’ensemble des ports algériens, des conteneurs charges d’équipements destines a une usine de trituration de graines d’oléagineux).

Les privatisations touchent d’abord les entreprises du secteur manufacturier ainsi que le BTP, induisant ainsi d’importantes destructions d’emplois. Toutefois, pour les grands ensembles industriels le processus de privatisation sera vite interrompu avec la flambée, durant les années 2000, des prix du pétrole. Car, des que la situation financière le permet, l’Etat fait le choix hasardeux et populiste d’injecter des ressources financières dans les entreprises publiques industrielles en renouant avec les couteux et interminables plans de restructuration ayant marque l’économie algérienne durant les années 80.
Les ressources en hydrocarbures qui ont certes permis d’avoir recours aux importations pour faire face a une demande de produits agricoles proportionnelle a une croissance démographique galopante, n’ont surtout pas manque d’enraciner une dépendance alimentaire faisant de l’Algérie l’un des plus gros importateurs de blé au monde et accentuant un exode rural désormais irréversible.

Occupant une place centrale dans tous les plans industriels conçus par les gouvernements algériens successifs, les entreprises publiques peinent à réaliser les bienfaits escomptés. Les unités industrielles dépendant de ces entreprises, réalisées, pour la plupart, « produit en main », souffrent d’un faible degré de maitrise technologique et d’autonomie par rapport aux concepteurs étrangers et accusent d’importants déficits d’exploitation, avec une faible utilisation des capacités de production. Les sureffectifs déplorés (15 a 30% des effectifs globaux) s’expliquent par le fait que l’allocation du travail reste dominée par des logiques sociales plutôt qu’économiques. L’emploi pléthorique dans l’administration et le secteur public pèse sur la productivité du travail.

Par ailleurs, la relation agriculture-industrie se limite à la production agricole pour l’industrie, notamment agro-alimentaire (conserveries, huileries, sucreries, semouleries, minoteries…). Dans cette branche ou le secteur prive, relativement bien implante, est plus efficace que le public, les difficultés d’approvisionnement, la sous-utilisation des capacités et l’insuffisance de la production par rapport aux besoins croissants obligent a recourir de plus en plus aux importations d’inputs (produits agricoles) et de produits finis. L’Algérie se trouve contrainte d’importer pour satisfaire la demande sociale et pour pallier aux incohérences et aux limites de son modele économique.

Soumis, pour leur part, à des conditions contestées par les investisseurs étrangers (association obligatoire avec des partenaires algériens détenant la majorité du capital: règle du 51/49), les investissements directs étrangers (IDE), qui auraient pu booster l’outil industriel algérien se font très rares, privant ainsi les entreprises algériennes des possibilités de travailler dans le cadre de la sous-traitance et, surtout, des transferts de technologie inhérentes à toute installation de sociétés étrangères.

Survint alors l’ambitieuse, mais infructueuse, reforme de 1988 visant à redresser l’industrie algérienne en tentant une mise d’un terme a la tutelle de l’Etat sur une économie très dévastée. Elle ambitionnait, également, de préserver le système industriel en l’aidant a s’adapter et devenir performant. Cette reforme, qui s’est heurtée à de fortes résistances, ne prendra finalement qu’un caractère formel. Par ailleurs, de 1994 a 1999, le rééchelonnement de la dette contraint l’Algérie à adopter un programme d’ajustement structurel, visant le démantèlement partiel du système industriel et précipitera les privatisations.

 

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5 تعليقات

  1. Le fiasco n’est pas uniquement économique, il est total. Un états dans lequel son peuple est infantilisé et est privé de ses droits et devoirs, par une caste armée, des généraux analphabète, genocidaire et inculte ou des maitres d’Esclaves comme au Maroc, Seoudite, Emirates ou autres pays tel le Liban c’est que l’échec est annoncé et espérons qu’il ne soit pas brutal.

    Un peuple doit vivre librement chez lui et avoir un regard et un contrôle total sur les affaires de sa cité.

  2. Le tournant raté c’était durant les années 2000 quand la Issaba Bouteflika était au pouvoir et que toi Semmar tu cirais les pompes parce qu’ils te retribuaient grassement…Du coup ton charabia d’article est ridicule et d’une hypocrisie à ton image…
    Espèce de Harki va… Tu es un lâche et tu es complice de la situation actuelle Parce que à l’époque tu la cachait contre des billets et la belle vie.
    T’es pas un homme. T’es une merde

  3. Depuis 1962 les décideurs « entre-guillemets » qui ont remisé leurs treillis au magasin des accessoires pour s’essayer à la « boulitique » n’ont réussi ni à faire leur métier correctement ni laissé aux civils la politique qui est leur métier naturel !
    Aujourd’hui, ils ne font pas parce qu’ils ne savent pas et de plus, grâce à la force, ils empêchent les autres de faire !
    Alors, « Mesmar Djeha », Eddi Wa La, Khelli !!!