L’hôtel Strasbourg de Genève était l’établissement préféré des généraux algériens qui partaient séjourner régulièrement en Suisse pour « leurs affaires et business personnels ». Mais depuis 2019, l’année dernière, cet hôtel a été vendu à son propriétaire et change totalement de vocation puisqu’il ne pourra plus accueillir « gratuitement » et « gracieusement » les dignitaires des services secrets et de l’armée algérienne comme c’était le cas depuis 1978 !
En effet, Mohamed Derouazi, un millionnaire algérien établi à Genève depuis les années 70 et propriétaire de l’hôtel Strasbourg, a vendu cet hôtel pour près de 20 millions de francs suisses, a appris Algérie Part de plusieurs sources concordantes. Très âgé et affaibli, Mohamed Derouazi ne peut plus assurer le fonctionnement de cet hôtel, une adresse incontournable pour les décideurs algériens à Genève.
Situé à la rue Pradier, juste à quelques encablures de la très courue promenade qui longe le Lac Léman, l’hôtel Strasbourg n’est pas un Palace ni un Hôtel 5 étoiles comme les autres établissements très chics de Genève. Mais l’hôtel Strasbourg a une particularité importante : il est la propriété d’un homme d’affaires algérien ayant entretenu pendant longtemps des liens étroits avec plusieurs généraux algériens, à savoir Mohamed Derouazi, originaire d’El- Eulma de la wilaya de Sétif.
A l’hôtel Strasbourg, les généraux algériens bénéficiaient de toutes les faveurs et surtout d’une discrétion totalement préservée. Leurs déplacements étaient tenus secrets et leurs séjours étaient savamment organisés pour ne pas éveiller les soupçons des autorités suisses. Selon nos investigations, durant les années 80, 90 et jusqu’aux débuts des années 2000, plusieurs personnalités algériennes fréquentaient régulièrement cet hôtel. La liste est longue. Mais le visiteur le plus célèbre de l’hôtel Strasbourg de Genève fut le feu général-major Smaïn Lamari, le patron de la Direction du contre-espionnage du DRS pendant de très nombreuses années. Avant sa mort le 27 août 2007 des suites d’une maladie pour laquelle il était suivi à l’hôpital Ain Naâdja d’Alger, le général Smaïn Lamari se déplaçait très souvent à Genève où il passait plusieurs nuits dans cet hôtel. Beaucoup de rumeurs circulent à propos des motifs et fantaisies des voyages de l’ex-patron du contre-espionnage algérien à Genève.
Le général-major Rachid Laalali dit Attafi, l’ex-patron de la sécurité extérieure du DRS au cours des années 2000, se rendait souvent lui-aussi dans cet hôtel genevois. Ce général a occupé plusieurs fonctions importantes comme lorsqu’il dirigeait la Direction de la documentation et de la sécurité extérieure (DDSE). Le général Hadj Rafik, le colonel Aziz du DRS et le général Zerhouni qui fut le directeur de l’intendance au ministère de la Défense nationale, ont marqué aussi leur présence dans cet hôtel. Des hauts responsables civils descendaient également dans le fameux hôtel Strasbourg de Genève. Parmi eux, on peut citer un certain Amar Zegrar, lex-secrétaire général de la présidence de la République entre 1997-1998.
Ces dernières années, des personnalités algériennes civiles commençaient à fréquenter assidument l’hôtel Strasbourg à Genève comme l’ancien ministre des Affaires Religieuses de 1997 jusqu’à 2014, Bouabdellah Ghlamallah. Aujourd’hui, avec la vente de l’hôtel Strasbourg, une page de l’histoire secrète du régime algérien en Suisse se tourne. Les chambres de cet hôtel ont abrité de nombreuses intrigues et des conciliabules qui expliquent certainement les dessous de nombreux sombres épisodes politiques dans notre pays. Signalons enfin que son propriétaire Mohamed Derouazi a pu l’acheter en 1978 grâce à un don généraux du célèbre Messaoud Zeghar qui fut l’un des hommes les plus riches et les puissants d’Algérie indépendante grâce à ses affaires dans le business international des armes. Il était l’ami intime de l’ancien président Houari Boumediène.