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dimanche, avril 28, 2024

5 milliards de centimes pour une station-service à l’intérieur du pays, 10 milliards pour les grandes villes et 30 milliards pour les wilaya frontalières : le business mafieux des autorisations de distribution des carburants en Algérie

C’est un dossier sur lequel personne n’a jamais écrit la moindre ligne. Il s’agit d’un secteur qui est totalement verrouillé et seuls les initiés et fins connaisseurs ont conscience de l’ampleur dramatique de ce fléau qui dure depuis de très nombreuses années en Algérie. Et pour cause, ce dossier concerne directement un secteur juteux, très juteux : celui de la distribution des carburants et des produits para-pétroliers ou pétroliers. 

Officiellement, en Algérie, pour ouvrir une station-service, un exploitant privé doit confectionner tout un dossier administratif et demander un agrément spécifique ainsi que les accords de plusieurs commissions ou instances publiques. En effet, il est obligatoire de remplir la demande d’agrément pour l’exercice des activités de stockage ou de distribution des carburants des produits pétroliers. Cette demande d’agrément, il faut la retirer et la remplir au niveau de la direction de l’Energie de la wilaya sous l’égide de l’autorité de régulation des hydrocarbures (ARH). C’est la première étape qu’il faut franchir pour l’ouverture d’une station-service.

Ensuite, il faut obtenir un engagement de fourniture en carburants auprès de Sonatrach ainsi que l’accord de la commission de sécurité de la Wilaya  et d’installations de stockage et de distribution de carburants dans les wilayas frontalières et les wilayas limitrophes aux wilayas frontalières. Il faut également parapher un cahier des charges régissant les mesures qu’il faut respecter dans le processus de  distribution des carburants en Algérie. Bref, la procédure est très complexe et peut s’avérer un véritable chemin de croix pour les investisseurs privés.

Mais cette difficulté est, malheureusement, surmontée en Algérie très facilement grâce aux pots-de-vin ! En effet, pour faciliter l’obtention de l’agrément, il faut mettre la main à la poche. Ensuite, il faut soudoyer certains membres des commissions de sécurité, mais d’abord et avant-tout, il faut convaincre NAFTAL, la filiale de Sonatrach chargée de la distribution des carburants, de signer le précieux contrat de livraison et de fourniture des carburants au privé demandeur. Pour obtenir ce droit à l’approvisionnement et le droit d’exploiter la marque ou le sigle NAFTAL, l’opérateur privé doit traiter avec la direction du  « Développement Activités Réseau et Hors fuel » qui relève de la direction de la Branche Commercialisation de NAFTAL.

Et c’est au niveau de cette étape où les opérateurs privés doivent « sortir le chéquier » afin de se protéger contre toute tentative de sabotage parce que si NAFTAL refuse de vendre en gros des carburants à l’exploitant d’une station-service, son business est tout bonnement mort. Et à cette étape-là, force est de constater qu’il y a une nomenclature de la corruption totalement décoiffante.

En effet, pour obtenir des carburants et toutes les autorisations nécessaires à l’ouverture d’une station-service dans une wilaya de l’intérieur du pays, le pot-de-vin est fixé à 5 milliards de centimes. Mais si la station-service se situe dans une wilaya importante du nord du pays, à savoir des régions peuplées et bien fréquentées, il faut à ce moment-là débourser un pot-de-vin de 10 milliards centimes. En revanche, pour une station-service  située dans une wilaya frontalière comme Tlemcen, Tébessa, Souk Ahras ou El-Tarf, le pot-de-vin monte jusqu’à 30 milliards de centimes ! Pourquoi ? Parce qu’une station-service dans ces zones est tout simplement un business en or car il connecte les propriétaires des stations-services aux réseaux de la contrebande des carburants qui revendent l’essence, le sans-plomb ou le gazoil subventionnés en Algérie en Tunisie ou en Maroc moyennant des commissions colossales permettant d’amasser de véritables fortunes.

Les autorisations, agréments ou contrats d’approvisionnement avec NAFTAL reviennent « ainsi très chers » aux investisseurs privés qui veulent prospérer dans ces wilayas frontalières où tous les trafics se rejoignent.  Mais comme ce dossier reste secrètement géré à l’ombre des regards indiscrets des Algériens, toutes les dérives sont permises. Algérie Part poursuit ses investigations et reviendra sur ce dossier avec de nouvelles révélations…

 

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