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vendredi, mai 17, 2024

Exclusif. Sonatrach : les dessous d’un méga-projet de 5 milliards de dollars qui va aggraver l’épuisement des réserves gazières du pays

Dans la plus grande discrétion, la direction générale de Sonatrach a terminé la préparation du lancement d’un appel d’offres pour la réalisation d’un méga-projet gazier sur lequel elle ne dit rien aux médias pour conserver les secrets ténébreux d’un projet industriel vendu en interne à Sonatrach comme le plus grand projet pétrochimique de l’Algérie indépendante. Mais en réalité, il s’agit d’un méga-projet sans aucune garantie d’un retour sur investissement car il finira dans quelques années par épuiser entièrement les réserves gazières du pays. Révélations. 

Cet appel d’offres que la direction générale de Sonatrach prépare secrètement et sans faire de bruit concerne le Projet de production de Polyéthylène à Skikda. C’est un vieux projet qui était en cours d’étude depuis 2017-2018. A l’époque, sa réalisation était prévue en partenariat avec la compagnie Sud-Coréenne DAELIM. Et à partir de 2019, l’homme qui deviendra en février 2020 PDG de Sonatrach, Toufik Hakkar, avait fixé le montant nécessaire à sa réalisation. Il s’agit d’un investissement de…. 5,4 milliards US$. Oui, en sa qualité de membre du comité exécutif de Sonatrach et de vice-président Business Développement et Marketing de la compagnie nationale des hydrocarbures, Toufik Hakkar a fait du lobbying pour inscrire ce méga-projet sur la liste des priorités de Sonatrach dans le but de développer la pétrochimie nationale en Algérie.

Le Projet de production de Polyéthylène à Skikda est le « bébé » de Toufik Hakkar sur lequel il a travaillé plusieurs années dans l’espoir de le concrétiser. A son arrivée à la tête de Sonatrach au mois de février 2020, ce projet sort des tiroirs de la direction générale de Sonatrach et devient une priorité absolue.

Mais Toufik Hakkar va se heurter à un mur et il sera empêché de lancer ce méga-projet en 2020. D’abord, la crise financière provoquée par la crise sanitaire va bouleverser entièrement le secteur des hydrocarbures. Et la Sonatrach a été instruite par la Présidence algérienne de baisser drastiquement ses investissements avec pour objectif d’économiser jusqu’à 7 milliards de dollars. Ensuite, au ministère de l’Energie, un certain Abdelmadjid Attar, lui-même un grand connaisseur du secteur et l’un des plus anciens cadres dirigeants de Sonatrach, s’est opposé catégoriquement à ce qu’il qualifiait lui-même de « folie ».

En effet, ce méga-projet n’a pas été validé par l’ex-ministère de l’Energie depuis l’arrivée d’Abdelmadjid Attar lequel a bien décelé les anomalies de ce projet qui repose sur la surfacturation de plusieurs prestations et réalisations d’infrastructures énergétiques. Et l’Algérie, frappée par la crise financière, ne peut pas se permettre un autre gâchis budgétaire. Mais Toufik Hakkar n’a jamais reculé ou abdiqué face à la résistance d’Abdelmadjid Attar et avec le soutien du Premier-ministre, Abdelaziz Djerrad, son parrain, il a continué de se battre pour imposer la conclusion de ce méga-projet avec les sud-coréens.

Selon nos investigations, Toufik Hakkar travaille sur ce méga-projet depuis 2015. A cette époque, il était uniquement directeur exécutif stratégie et planification et membre du comité Exécutif de Sonatrach. Toufik Hakkar avait effectué au moins 3 visites de 2015 jusqu’à 2019 en Corée du sud pour rencontrer les managers du groupe DAELIM. Ce méga-projet de 5,4 milliards de dollars est le seul bébé de Toufik Hakkar.

Cependant, le contexte financier défavorable né dans le sillage de la pandémie de la COVID-19 et la résistance de plusieurs cadres dirigeants à ce méga-projet jugé trop onéreux et dangereux pour les équilibres du groupe Sonatrach en raison de ses incertitudes financières ont fini par obliger Toufik Hakkar de se mettre en « mode pause ». Mais il n’a pas enterré son rêve et aujourd’hui, depuis janvier 2021, avec la complicité de son parrain le Premier-ministre, Abdelaziz Djerad, le PDG de Sonatrach veut forcer l’administration du groupe à organiser la signature officielle de ce méga-projet. La proximité troublante et inquiétante de Toufik Hakkar avec Daelim a soulevé de nombreux doutes alimentant ainsi un véritable malaise.

Mais le limogeage brusque d’Abdelmadjid Attar du ministère de l’Energie à la fin du mois de février dernier a ouvert un grand boulevard à Toufik Hakkar qui a pu asseoir entièrement son pouvoir sur le secteur des hydrocarbures aidé et soutenu par son mentor Abdelaziz Djerad.

Et c’est ainsi que depuis le début de ce mois de juin, la direction générale de Sonatrach a achevé toutes les études techniques nécessaires à la publication d’un appel d’offres international qui lancera définitivement ce méga-projet. Les jours passent et cet d’appel d’offres international n’a pas encore vu le jour. Pourquoi ? Parce que secrètement, Toufik Hakkar négocie avec les intermédiaires de deux compagnies chinoises avec lesquelles il espère réduire les coûts de la réalisation de ce méga-projet afin de ne pas susciter les soupçons des autorités suprêmes du pays. Ces deux compagnies chinoises s’appellent La China Petroleum and Chemical Corporation ou Sinopec ainsi que la China National Petroleum Corporation (CNPC).

En toute illégalité et en violation de toutes les réglementations régissant la passation de  marchés publics en Algérie, le PDG de Sonatrach a fait fuiter des informations confidentielles et stratégiques sur cet appel d’offres international pour les transmettre à SINOPEC et CNPC, a pu confirmer Algérie Part au cours de ses investigations.

Le patron de Sonatrach et ses collaborateurs acolytes à la direction générale ont préparé ainsi le terrain au truquage déguisé de ce marché afin de permettre aux deux compagnies chinoises de surmonter les obstacles de la concurrence loyale. En nouant une alliance secrète avec le PDG de Sonatrach et ses plus proches collaborateurs, SINOPEC et la CNPC espéraient obtenir des avantages certains par rapport aux autres soumissionnaires potentiels puisque ces deux sociétés chinoises ont préalablement toutes les informations nécessaires pour leurs offres répondent aux exigences des dossiers d’appels d’offres de Sonatrach.

Mais le scandale ne s’arrête pas-là. En vérité, au delà des pratiques suspectes de la direction générale de Sonatrach qui peuvent donner lieu à un véritable scandale de corruption, ce méga-projet en lui-même constitue une grave menace pour les réserves gazières du pays.

Ce méga-projet budgétisé à plus de 5 milliards de dollars  consiste à se lancer dans  la Production d’acide téréphtalique (PTA) et de Polyéthylène Téréphtalate (PET) à Skikda avec un traitement de 150.000 t/an et 120.000 t/an respectivement.  Le polyéthylène, préparé par polymérisation de l’éthylène, est la matière plastique la plus utilisée. Il se présente sous forme de polyéthylène haute densité, basse densité ou linéaire à basse densité obtenu, pour ce dernier, par copolymérisation avec principalement du but-1-ène. Il peut aussi être préparé avec du bio-éthylène obtenu par déshydratation du bioéthanol provenant de la fermentation du sucre de canne à sucre. Il est très employé dans les emballages. Les polyéthylènes basse densité et linéaire donnent des produits souples (films, tuyaux…), le polyéthylène haute densité donnant des produits rigides.

Il s’avère que ce processus industriel nécessite d’énormes quantités de gaz naturel. En 2019, une délégation du géant sud-coréen DAELIM s’est déplacée à Alger pour organiser les managers de Sonatrach en présence de leur interlocuteur privilégié Toufik Hakkar. Les sud-coréens ont clairement expliqué que pour bâtir et mettre en service un grand complexe de production de Polyéthylène, il leur faut un accès privilégié aux livraisons du gaz naturel fournies par la Sonatrach.

Les représentants de DAELIM ont exigé ainsi à ce que la Sonatrach s’engage à leur livrer du gaz naturel à des prix préférentiels pour ne pas subir les fluctuations des prix observées sur le marché mondial. Les négociateurs sud-coréens ont demandé un engagement de la part de Sonatrach sur une période de… 18 ans. Oui, 18 longues années au cours desquelles la compagnie nationale des hydrocarbures doit livrer du gaz naturel, la matière première incontournable, à des prix préférentiels pour assurer la rentabilité de ce méga-projet pétrochimique. Naturellement, à l’époque, la direction générale de Sonatrach a refusé de satisfaire les besoins de Daelim. Et au lieu des 18 ans réclamés par les partenaires sud-coréens qui vont gérer concrètement le futur complexe pétrochimique de Skikda, la Sonatrach a proposé 12 années de fourniture du gaz naturel à des prix préférentiels pour les besoins de ce Projet de production de Polyéthylène à Skikda.

Un accord a été officieusement conclu et validé. Mais les chamboulements provoqués au sein de Sonatrach par le Hirak et l’instabilité politique du pays ont fini par geler ce projet de pétrochimie évitant ainsi à l’Algérie de subir un véritable préjudice qu’elle regrettera pour toujours.

Et pour cause, des études et documents confidentiels de Sonatrach consultés par la rédaction d’Algérie Part ont démontré que le méga-projet de production de Polyéthylène à Skikda avait des besoins colossaux en gaz naturel. Et rien que ce projet, il risquait de détourner dans les années à venir près de 20 % des capacités nationales vers l’export. Cela signifie que la Sonatrach devait renoncer à vendre des quantités considérables de gaz naturel en devises à l’étranger pour pouvoir alimenter ce méga-projet industriel.

Un choix qualifié de « suicidaire » par l’ancien ministre de l’Energie, Abdelmadjid Attar et de nombreux autres anciens hauts responsables de Sonatrach qui n’ont pas cessé de tirer la sonnette d’alarme sur le risque d’un épuisement accéléré des réserves en gaz naturel du pays avec le lancement de tels projets très mal encadrés et sans aucune perspective de rentabilité.

Toufik Hakkar a été averti à maintes reprises concernant ce risque d’épuisement des réserves nationales en gaz naturel. Son ancien conseiller, l’expert Ali Hached, lui-même ancien vice-président commercialisation de Sonatrach, avait lancé un véritable pavé dans la mare le 7 juin dernier en affirmant ouvertement dans une émission diffusée par la web radio Radio M que l’Algérie risque d’importer… du gaz naturel à partir de…. 2030 ! L’ex-responsable de Sonatrach a expliqué rationnellement et chiffres à l’appui que les plus grands gisements de gaz naturel du pays sont en train de décliner dangereusement. Le grand champ de Hassi R’mel est en train « mourir doucement » et il risque de s’épuiser définitivement d’ici les 7 prochaines années est très élevé alors que la demande nationale est en constante augmentation car le gaz naturel est utilisé dans la production massive de l’électricité en Algérie et pour raccorder annuellement pas moins de 62 % des foyers algériens au niveau national.

A partir de 2030, où la population algérienne dépassera les 55 millions d’habitants, les réserves de gaz naturel qui sont aujourd’hui de 2.368 milliards de mètres cubes ne seront plus suffisantes pour répondre aux besoins nationaux et pour exporter ensuite vers l’étranger et gagner des revenus en devises. L’Algérie ne pourra plus à partir de 2024-2025 continuer d’exporter entre 50 et 60 milliards de mètres cubes comme elle le faisait auparavant, a reconnu à ce propos Ali Hached au micro de Radio M.

Dans ce contexte si incertain et difficile, l’Algérie ne peut se permettre le luxe de gaspiller son gaz naturel pour alimenter des projets industriels sans aucune rentabilité prouvée prenant ainsi le risque de compromettre sa production nationale pour satisfaire des besoins nationaux élémentaires comme l’électricité ou la consommation énergétique des foyers algériens.

Ces réalités palpables ont été illustrées par de nombreuses expertises remises au PDG de Sonatrach. Or, Toufik Hakkar, en dépit de ces réalités inquiétantes sur l’avenir de nos réserves gazières, a décidé de « foncer » dans un méga-projet à Skikda sans tenir compte de l’importance de préserver les besoins nationaux. C’est une posture dangereuse qui nuit à l’intérêt national. Une posture digne d’un crime économique caractérisé.

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5 تعليقات

  1. il est prouvé aujourd’hui que le sous sol algérien recèle 70 000 milliards de mètre cubes de gaz naturel non conventionnel récupérables .Pourquoi priver l’économie algérienne d’un projet nécessaire au développement de l’agriculture et du bâtiment notamment .Ce gaz non conventionnel sera tôt ou tard exploité comme il l’est couramment aux USA qui l’exportent même en Europe.

  2. Quel fils de catin de Semmar….Quelle ordure.
    Les dernières taupes à l’intérieur de la Sonatracht font feu de tout bois avant de se faire éjecter pour avoir participer durant des années au pillage et au saccage de la Sonatracht à une échelle industrielle !

    Comme Hakkar les cible et les dégage alors ils sortent toutes les informations stratégique du groupe pour…. Saboter le développement de cette société’

    Ils sont adeptes comme Semmar du : après moi le déluge…Rien à foutre du pays et de son devenir. Ils ne font que satisfaire leurs bas instincts de vengeance personnelle.

    Pour en revenir à ce fils de catin de Semmar, si la Sonatracht investissait pas pour anticiper l’avenir à travers de gros projets…..Ce même fils de catin tirerait à boulets rouges en accusant la direction de la Sonatracht de ne rien faire pour trouver de nouvelles ressources….

    Comment ce fils de catin peut se dire algérien soucieux de l’Algérie ????

    C’est un véritable Harki qui pratique la politique de la terre brûlée Parce qu’il a tout perdu avec la chute de ses parrains du clan Bouteflika.

    Voilà ce qui gangrène l’Algérie. Les petites sous merdes frustrés et aigris qui ont pourtant tellement profité de manière illégitime des richesses du pays…

    Comme on dit : Kayene Rebbi Sobhanou….

    Semmar finira très mal et ce ne sera que justice