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jeudi, mai 9, 2024

Enquête. Emploi et chômage : les chiffres et les données à l’origine de l’instabilité politique permanente en Algérie

L’emploi, le travail, le chômage, la précarité sociale, la pauvreté et le sentiment d’exclusion. Voila des maux que les Algériennes et Algériens subissent de plein fouet au quotidien et ce depuis de nombreux années. Mais ces maux ont été toujours relativisés, sous-estimés et traités avec une énorme indifférence par les autorités algériennes. Ces dernières ont toujours communiqué des chiffres « officiels » qui diminuent la portée du chômage et de la pauvreté des Algériens. Mais, dans la réalité, est que l’emploi et le chômage étaient depuis des années une véritable bombe à retardement. Aujourd’hui, l’Algérie patine encore dans une profonde crise politique qui s’est enclenchée officiellement depuis le 22 février 2019 avec l’avènement du Hirak et la chute du régime Bouteflika le 2 avril 2019. Mais en réalité, les origines de cette crise sont beaucoup plus anciennes. Et en 2021, cette crise politique est appelée à durer encore car l’origine du mal n’a pas été encore traité sérieusement. Il s’agit de la problématique de l’emploi et du chômage qui est la source toutes les instabilités du pays. Enquête. 

La jeunesse algérienne de moins de 30 ans, qui représente 53,9% de la population souffre d’un taux de chômage élevé en raison du manque de formations adéquates pour accéder au marché de l’emploi et d’accès à un emploi lanceur de carrière. Alors que la population
active a atteint, en septembre 2018, 12 463 0004 personnes, le marché a du mal à intégrer les jeunes générations, le chômage des jeunes atteignant 29,1%5, affectant particulièrement ceux qui ont fait des études supérieures.

Après des années de recherche infructueuse, de nombreux demandeurs d’emploi sont découragés et 1 sur 5 devient un NEET, Not in education, employment or training / pas dans l’éducation, l’emploi ou la formation,  l’Office National Algérien des Statistique (ONS) signale que 92% des personnes âgées de 15 à 19 ans ont un emploi informel.

Malgré les performances élevées des femmes dans l’enseignement supérieur (63% de tous les diplômés universitaires sont des femmes et 54% des diplômes sont détenus par des femmes), le chômage des jeunes femmes atteint 40,8%.

Bien qu’il n’y ait pas de données désagrégées officielles pour étayer les niveaux problématiques de chômage dans les villes cibles du projet10, les sources en ligne font souvent état de troubles sociaux directement liés au chômage. Tout cela met en péril la compétitivité et la croissance et peut conduire à la frustration, qui devient à son tour une source potentielle d’instabilité socio-économique ou un motif d’émigration.

De ce fait, l’Algérie s’est classée 92ème sur 140 dans l’indice de compétitivité mondiale en 2018 du Forum Economique Mondial (WEF), obtenant un bas rang concernant l’efficacité du marché de l’emploi ainsi que l’enseignement supérieur et la formation. Elle s’est également classée 126ème sur 183 selon l’Indice Mondial du Développement de la Jeunesse du
Commonwealth en 2016, après avoir baissé de 8% par rapport à 2015, la plus forte baisse parmi les pays de la région Moyen-Orient Afrique du Nord (MENA).

Un sondage mené en 2016 par la firme de relations publiques Asda’a Burson-Marsteller auprès de 3 500 jeunes de la région MENA (y compris l’Algérie) a révélé que les jeunes croient que le manque d’emplois et d’opportunités constitue la principale raison de leur
désenchantement. Dans le même ordre d’idées, le projet SAHWA12 financé
par la Commission Européenne en 2014-17, 86% des personnes interrogées ont cité le manque d’opportunités professionnelles, des revenus plus faibles et de mauvaises conditions de vie comme raisons de vouloir émigrer, et bien que 75% aient exprimé qu’elles ne souhaitaient pas émigrer, elles l’envisageraient toutefois étant donné
la situation dans leur pays.

En 2016-17, L’ONG d’Education For Employment, une ONG internationale à but non lucratif motivée par la forte volonté d’améliorer les opportunités d’emploi offertes aux jeunes chercheurs d’emploi dans les pays du Moyen Orient et d’Afrique du Nord, a mené une analyse approfondie du marché de l’emploi algérien qui comprenait des entretiens avec 212 entreprises du secteur privé, 57 entretiens avec des directeurs RH, 17 entretiens avec des experts en emploi et formation et 15 entretiens avec des représentants d’institutions privées et publiques.

Ceux-ci ont servi à établir les principaux secteurs de croissance du pays, dont : Grande distribution, TIC, Tourisme, Industrie, Agroalimentaire, Transport, Construction, Pharmaceutique. EFE identifia aussi les besoins d’embauche des entreprises algériennes à travers une analyse des compétences les plus demandées identifiées par les employeurs : Compétences en Communication, Leadership, Professionnalisme, Organisation, Résolution de conflits, Savoir être, Travail d’équipe, Esprit d’analyse et d’innovation, etc., toutes des compétences non techniques.

Les employeurs consultés par EFE dans le cadre de cette analyse parlent d’un manque de préparation générale à l’emploi et de compétences spécifiques. Les compétences non techniques mentionnées ci-dessus sont parmi les plus demandées, mais l’éventail est très large, incluant également la langue, les compétences analytiques, les techniques de présentation de CV et d’entretien, et le comportement général au travail comme la ponctualité, la flexibilité et une tenue de travail adéquate. Il y a une grave inadéquation entre les compétences recherchées par les employeurs et les compétences des nouveaux
demandeurs d’emploi.

Le système d’enseignement public ne fournit pas aux jeunes les compétences du 21ème
siècle exigées par les entreprises, les universités publiques continuant de se concentrer sur des emplois traditionnels et publics plutôt que sur des emplois très en demande dans les secteurs à croissance rapide. Cette étude de marché de l’emploi constate que deux ans plus tard, le même défi perdure.

L’Office National des Statistiques ONS a montré dans ses bulletins statistiques que le taux de chômage des femmes (19,40%) est toujours plus élevé que celui des hommes (9,9%). Selon la dernière enquête décennale sur les dépenses de consommation et le niveau de vie des ménages menée par l’Office National algérien des Statistiques en 2011, le salaire net mensuel moyen des femmes était de 33 900 DZD, celui des hommes de 28 700 DZD. Selon cette étude, bien que les femmes ne représentent que 15,7% de la main-d’œuvre, 44,4% des femmes salariées ont un diplôme universitaire contre seulement 10,7% pour les hommes, ce qui illustre le fait que le salaire moyen algérien augmente fortement avec le niveau de formation.

Il est crucial de contrer cette inégalité. En effet, un nombre d’études révèle qu’au-delà
de la promotion de la dignité et de l’indépendance financière, l’amélioration du taux de participation des femmes au marché de l’emploi présente des avantages considérables pour les entreprises, les revenus des ménages et la production nationale, régionale et internationale.

Il est à souligner, en outre, que le tissu économique formel algérien ne favorise pas la création massive d’emplois et de richesses. Et pour cause, il est composé d’un total de 178 575 entreprises réparties à 4,66% dans le Sud, 15,95% dans l’Ouest, 24,99% dans l’Est et
54,40% dans le Centre du pays. L’effectif moyen de 34% des entreprises ne dépasse pas les 5 personnes, contre seulement 1% d’entreprises qui emploient plus de 100 personnes.

Entre Janvier et Juin 2018, 72% des entreprises enregistrées, soit la majorité d’entre elles, activent dans les industries manufacturières, du commerce, réparation automobile et de motocycles et du transport et entreposage.

Selon le rapport mensuel publié par l’Agence nationale de l’emploi (ANEM) en février 2019, parmi les offres d’emploi enregistrées, 19% sont issues d’organisations publiques, 8% des sociétés privées étrangères installées en Algérie et 73% d’opérateurs économiques privés nationaux.

Les entreprises dont l’activité principale est le service aux entreprises représentent le premier recruteur avec 37% des offres enregistrées par l’ANEM, suivies de sociétés manufacturières et industrielles à 32% et le BTPH à 29%. Seules 75% demandes de recrutement des entreprises ont été comblées par les services de l’ANEM. Les 25% des opportunités d’emploi non comblées sont à 40% des offres d’emploi liées aux métiers des
Services, à 29% aux métiers du BTPH, à 28% aux métiers des industries manufacturières et à 2% aux métiers de l’agriculture. La taille très modeste des entreprises algériennes ne permet pas ainsi d’absorber le chômage des jeunes Algériens et la faiblesse de leur activité économique ne permet pas non plus de capter de nombreux profils de jeunes diplômés algériens qui demeurent ainsi dépendants de l’ANEM pour trouver un job. Or, les emplois proposés par l’ANEM sont souvent précaires, très mal rémunérés et offrent peu de perspectives d’évolution de carrière. C’est pour cette raison que les frustrations des jeunes chômeurs algériens ne cessent de s’accumuler au cours de ces dernières années.

 

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1 تعليق

  1. À Massinissa et a toutes les victimes du printemps kabyle 2001 A tous ces jeunes qui ont sacrifie leur vie ….. Non a l’oubli
    :
    Paix a leurs ames une pensee sincere a leur famille .Comme chaque annee , nous ne vous oublierons jamais.

    le combat pacifique peut vaincre la puissance des armes.