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jeudi, mai 2, 2024

Document. Les juges, les policiers et les services secrets : l’incroyable déballage de l’affaire Algérie Part

La fameuse affaire « Algérie Part » a abouti à des déballages judiciaires extrêmement graves qui nous apprennent que la Justice algérienne considère indirectement les services secrets algériens, l’institution sécuritaire la plus sensible et délicate de l’Etat algérien, comme une « organisation criminelle ». Non, ce n’est pas du une blague de mauvais goût, c’est bel et bien la conclusion à laquelle on peut aboutir à la lecture des 48 pages du verdict prononcé officiellement le 8 novembre 2023 par les juges du tribunal de Bir Mourad Raïs à Alger.

Dans les 48 pages de ce jugement, il est écrit noir et sur blanc dans les pages 16, 17 et 25 que le collaborateur d’Algérie Part Samir Lounès, interpellé par les éléments de l’Office Central de Lutte contre le Crime Organisé de la Police Algérienne, fin décembre 2022 aurait avoué lors de ses diverses auditions qu’il « travaillait » directement pour les services secrets algériens à travers la Direction Générale de la Sécurité Intérieure (DGSI), le renseignement intérieur algérien. Selon les PV d’audition des policiers algériens qui ont été confirmés et validés par les magistrats du tribunal de Bir Mourad Raïs, Samir Lounes aurait missionné par les services secrets algériens pour « infiltrer » Algérie Part et les milieux des « opposants » ou journalistes indépendants algériens exilés en France.

Des aveux extrêmement intrigants obtenus dans des conditions troublantes qui n’ont jamais été encore précisées. Mais malgré ses aveux, les juges du tribunal de Bir Mourad Raïs ont condamné Samir Lounès à la prison ferme considérant ainsi ses agissements comme « illégaux » et portant « atteinte » à la sécurité nationale et les intérêts suprêmes de l’Etat algérien. Une posture totalement incroyable car la Justice algérienne devient le premier appareil judiciaire d’un pays souverain qui condamne officiellement un « agent » en mission des services secrets de ce même Etat. Samir Lounès a prétendu qu’il avait à chaque fois le feu vert et les autorisations de son officier de liaison au sein de la DGSI pour opérer ses activités en France. Sur quelle base légale, les juges algériens peuvent ainsi le condamner à la prison ferme alors qu’il aurait été en « mission officielle » pour le services de renseignement algériens ?

Ce jugement amène à classer les services secrets algériens comme une « organisation criminelle » qui travaille contre les intérêts de l’Etat algérien lui-même. Une posture extrêmement grave qui fragilise de l’intérieur l’Etat algérien. En vérité, le commentaire et l’analyse de cette affaire rocambolesque fait ressortir une immorale instrumentalisation de la Justice algérienne pour alimenter une guerre de clans déclenchée par l’ancien patron de la DGSN, la Police algérienne, Farid Zineddine Bencheikh, contre les services secrets algériens de 2022 jusqu’à fin de l’année 2023 dans l’optique d’affaiblir cette institution sécuritaire en faisant croire au Président Abdelmadjid Tebboune qu’elle n’est pas suffisamment « loyale » vis-à-vis du pouvoir présidentiel ayant vu le jour au lendemain de l’arrivée de Tebboune à la tête de l’Etat algérien.

L’Affaire Algérie Part a été montée de toutes pièces par la DGSN fin décembre 2022 et début janvier 2023 par Farid Zineddine Bencheikh pour discréditer et déstabiliser les services secrets algériens qui menaient à son propos une profonde enquête sur des faits de corruption et de collaboration avec des entités étrangères très suspectes. Samir Lounès, le collaborateur d’Algérie Part, a été sans doute contraint sous les intimidations, les menaces et les pressions les plus violentes de faire des aveux incohérents, invraisemblables et un témoignage fantasmatique dans le seul but de confondre le travail d’investigation d’Algérie Part avec les activités d’infiltration des services secrets algériens. Une manœuvre profondément immorale cautionnée par la Justice algérienne qui s’est mise au service d’un clan du pouvoir politique engagé dans un processus d’affaiblissement des prérogatives des services secrets.

Pour rappel, le tribunal de Bir Mourad Rais, à Alger, avait rendu le 8 novembre 2023 son verdict dans l’affaire dite « Algérie Part » prononçant des peines d’emprisonnement contre tous les prévenus. Au moins 18 personnes ont été condamnées à diverses peines de prison ferme pour avoir uniquement collaboré, échangé et transmis des informations, des documents ou des preuves sur de gros scandales de corruption ayant ébranlé fortement des organismes publics ainsi que des institutions étatiques sensibles. Samir Lounes, le principal collaborateur d’Algérie Part et l’élément déclencheur de cette affaire, a été condamné à deux ans de prison, dont un an avec sursis. Il devrait quitter la prison à la fin du mois de décembre 2023 puisqu’il aura purgé l’équivalent de la totalité de sa peine en détention provisoire. Seize personnes, dont des fonctionnaires dans des entreprises publiques (un douanier, un officier de police, un employé à l’aéroport, une chargée d’étude à Naftal, ..etc) sont poursuivis dans cette affaire pour « publication et participation à la publication d’informations et de documents classées » en vertu de l’ordonnance sur la protection des documents administratif. On leur reproche avoir pris contact avec le journaliste, réfugié politique en France, Abderrahmane Semmar et son site électronique « Algérie Part ». Retrouvez les commentaires et analyses des dessous de cette incroyable machination judiciaire dans ce podcast vidéo de notre Directeur de Publication, Abdou Semmar :

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