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mercredi, mai 1, 2024

Confidentiel. Enorme malaise au sein du CREA de Kamel Moula : Hassen Khelifati brise la loi de l’omerta

Bénéficiant d’une immense et positive exposition médiatique, élevé au rang de première organisation patronale appréciée, reconnu et respecté par le pouvoir algérien, le Conseil du Renouveau Economique Algérien (CREA), dirigé par le controversé et sulfureux milliardaire Kamel Moula, ami intime de plusieurs anciens oligarques déchus comme Ali Haddad ou Mohamed Laid Benamor, connait en ce moment une véritable crise interne marquée par une contestation qui vient de la base et de certains cadres fondateurs lesquels dénoncent de nombreuses dérives de la direction monopolisée entièrement par Kamel Moula, l’homme que semble utiliser le clan Tebboune pour exécuter les sombres agendas aux visées politiques dans le monde des affaires économiques. Kamel Moula, homme clé du Palais Présidentiel d’El-Mouradia dans l’actuelle architecture du lobbying politique en faveur des intérêts de la continuité du clan Tebboune, cette posture semble déranger de plus en plus de membres du CREA qui en ont ouvertement marre de cette proximité incestueuse avec le pouvoir politique qui se joue au détriment des intérêts de leurs propres entreprises et activités économiques.

Les langues ont commencé à se délier et un homme a sonné la révolte au sein du CREA. Il s’agit de Hassen Khelifati, fondateur d’Alliance Assurances, l’un des plus importants groupes privés dans le secteur des Assurances depuis 2006. Diplômé en finance de l’École supérieure de commerce (ESC) d’Alger et titulaire d’un MBA en marketing décroché au Québec, Hassan Khelifati fut un ancien membre du Forum des Chefs d’entreprises (FCE), l’organisation présidée par Ali Haddad de 2014 jusqu’à 2019, et transformée à partir de 2020 en Confédération algérienne du patronat citoyen (CAPC) pour enterrer définitivement l’héritage gênant d’une organisation liée au régime Bouteflika. Le patron d’Alliance Assurances est également membre du Cercle d’action et de réflexion autour de l’entreprise (Care) et il fut l’un des cadres fondateurs du CREA en février 2022. Il était même l’un des candidats à sa Présidence avant de se retirer en cédant sa place au célèbre Kamel Moula qui ne cesse, aujourd’hui, de défrayer la chronique avec ses flirts excessifs avec le pouvoir politique au point où il s’arroge le pouvoir d’annoncer lui-même publiquement des changements majeurs dans la politique économique de l’Etat à la place des ministres, Premier-ministre ou membres les plus éminents du gouvernement.

Hassen Khelifati intervient souvent dans le débat économique en Algérie et depuis le 16 septembre dernier, il a décidé de briser le silence et la loi de l’omerta qui pesait sur tous les membres du CREA pour dénoncer la tournure actuelle des évènements et la manière très opaque avec laquelle ce patronat est dirigé par le clan Moula. Algérie Part a pu obtenir une lettre que Hassan Khelifati a adressé le 16 septembre dernier à Kamel Moula et à l’ensemble des cadres dirigeants du CREA pour leur faire part de sa décision de se retirer de son poste de Vice-Président de cette organisation patronale en guise de protestation contre la gestion très politisée et individualiste dont fait preuve la direction conduite par Kamel Moula et ses alliés.

Dans cette lettre que nous avons pu consulter, Hassan Khelifati a étalé tous les tenants et aboutissants du malaise qui pourfend de nombreux membres déçus et désenchantés de ce patronat. « J’ai pu modestement convaincre beaucoup de personnes et d’organisation pour nous rejoindre et venir renforcer nos rangs au niveau local, régional et national. J’ai défendu publiquement le CREA à mon corps défendant et sur les Mediaş même si j’ai dû transgresser et forcer l’interdiction qui m’a été faite de parler au nom du CREA, j’ai respecté cette décision et ce deal avec M le Président jusqu’au moment où j’ai constaté que cela obéissais à un desiderata personnel subjectif et que j’ai été le seul dans cette situation, je me suis décidé de me libérer de cet engagement », annonce-t-il ainsi d’emblée dans sa lettre dont nous détenons une copie.

« Actuellement, je me suis décidé de revenir à la situation antérieure et de ne plus m’exprimer au nom de notre syndicat le CREA. Néanmoins, mon engagement, mon histoire et ma conscience ne me laisse pas insensible ni passif par rapport à un ressenti collectif de démobilisation et d’incompréhension et que jusqu’à maintenant aucune tentative de l’éclaircir ou le dissiper n’a été entreprise. Ma lettre n’est ni une tentative de déstabilisation, ni un mouvement de contestation de l’autorité au niveau du bureau et de notre syndicat. Je considéré que ma conscience et ma responsabilité m’obligent d’alerter et d’éclairer M le Président sur un ressenti de frustration au sein des membres de bureau pour agir avant qu’il ne soit trop tard et essayer de corriger et réduire la démobilisation grandissante et la déception d’une majorité silencieuse qui n’ose pas s’exprimer publiquement pour des raisons évidentes de respect envers notre organisation et son président », explique encore dans le même document où il liste les anomalies ou attitudes intrigantes adoptées par la direction du CREA sur la place publique.

« Ma démarche n’est pas animée par ma frustration, ma colère et ma déception d’avoir été systématiquement éliminé de tous les derniers rendez-vous importants depuis plus d’une année, RDV présidentiels, délégation présidentiels et étrangères sauf les moins importantes comme élément de décor et de crédibilisation; activités locales en présence des hautes autorités ou je ne figure jamais sur les listes du CREA alors que je suis Vice-Président Fondateur, je peux considérer cela comme une diminution et une agression caractérisée contre ma personne, mon histoire dans le mouvement de lutte patronal et ma crédibilité. Je n’ai pas eu l’explication franche des causes réelles de cette situation inédite malgré mon insistance. On a essayé de me vendre par ricochet et expliquer par intermédiaire que mon élimination systématique obéi à des directives qui viennent d’ailleurs que je suis en droit de mettre en doute tant que je n’ai pas la preuve tangible, officielle et irréfutable que c’est le cas. Mes investigations et questionnements auprès qui de droit me font conclure que ce n’est pas le cas et que les raisons sont internes et personnels », révèle ainsi Hassan Khelifati qui pointe du doigt indirectement une sorte de prise en otage de l’organisation patronale par un clan déterminé monopolisant tous les privilèges et pouvoirs à son niveau. Il s’agit naturellement du clan Kamel Moula qui profite de sa proximité avec le Palais Présidentiel d’El-Mouradia pour imposer les personnes qui lui sont proches à toutes les rencontres stratégiques avec le Chef de l’Etat au détriment des autres membres fondateurs du CREA.


« Même nos membres de bureau sont en droit de se poser des questions sur la notion de bureau du CREA élargi qui a été reçu par le Président de la république. Comment des membres de la dernière heure et des non membres font partie de cette délégation et d’autres missions présidentiels et a répétition alors que des membres du bureau qui ont porté le projet, se sont sacrifiés, se sont engagés publiquement et défendus le projet contre vents et marées ne sont ni retenus ni informés au moins. Le degré de frustration et de démobilisation risque de devenir problématique si des mesures urgentes de remobilisation, de rassemblement, de clarification ne sont pas prises », prévient à ce propos Hassan Khelifati qui dévoile dans sa lettre un énorme malaise pouvant mener vers l’implosion du CREA.

« Notre association subit des attaques et nous sommes par ricochet des dommages collatéraux. Notre président et certains membres dont moi-même subissent des attaques violentes sur les Réseaux Sociaux, nos photos sont exhibées et une manœuvre de déstabilisation certaine est en marche et on ne peut y faire face qu’on étant solidaire et que la confiance revient entre nous de nouveau. Notre association a été impliquée à son corps défendant dans une tourmente qui la dépasse », déplore toujours sa lettre le patron d’Alliance Assurances qui déplore indirectement les conséquences fâcheuses de cette politisation outrancière du CREA qui se met au service du pouvoir présidentiel sans tenir compte des risques élevés de cet alignement systématique sur un clan du régime algérien pour l’avenir de l’organisation.

Les mêmes erreurs commises par le FCE sont en train d’être reproduites par le CREA, à savoir la transformation d’une organisation patronale comme simple relai idéologique et financier au profit du Chef de l’Etat en violation systématique des valeurs de neutralité et de pragmatisme qui doivent normalement animer une organisation patronale. Dans sa longue lettre, Hassan Khelifati explique et explore d’autres causes qui mènent vers le discrédit du CREA.

« Les membres du CREA qui sont attaqués aujourd’hui pour leur appartenance à l’ex FCE ne sont pas responsables des agissements des anciens dirigeants minoritaire du FCE et chacun à sa propre histoire et l’histoire de sa famille. Quelques choses malheur est bon, peut-être que c’est le moment de se remettre en cause et de se poser les bonnes questions pour voir ce qui n’a pas fonctionné et essayer de se corriger ; retravailler notre image et notre mode communication, se serrer les rangs et affronter collectivement, dans l’unité et défendre notre association, nos valeurs, notre projet commun, nos membres et notre projet d’intérêt commun pour notre pays, notre état, les reformes économiques structurelles, notre économie, les générations futures et nous-même », souligne enfin Hassan Khelifati qui a appelé à l’urgence de « réécrire une nouvelle feuille de route et revoir complétement et profondément notre fonctionnement ». « Il est impératif et vital de poser les bonnes questions et y apporter les réponses », décrète-t-il en dernier lieu pour tirer la sonnette d’alarme sur les dangers qui guettent à l’avenir les membres du CREA à cause du mode de gestion actuelle de cette organisation patronale.


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