Ce n’est pas une cérémonie comme les autres. La cérémonie de remise de grades et de médailles aux officiers de l’Armée nationale populaire, au Palais du peuple, à l’occasion du 58e anniversaire de la fête de l’indépendance et de la jeunesse, a une portée symbolique inédite dans l’histoire algérienne. C’est la première fois depuis de nombreuses années que cette cérémonie purement militaires dédiée à la promotion des officiers de l’armée algérienne et de ses généraux les plus influents a été organisée au Palais du Peuple, lieu d’une institution civile.
D’habitude, cette cérémonie est organisée au niveau du siège du ministère de la Défense nationale. Durant les années précédentes, cette cérémonie a toujours été organisée par les hauts responsables du ministère de la Défense nationale et elle a toujours été présidée par le Chef d’Etat-Major de l’Armée nationale populaire. A l’époque du défunt Ahmed Gaid Salah, qui assumait également la fonction de vice-ministre de la Défense nationale, cette cérémonie était organisée au ministère de la Défense nationale « au nom du Président de la République, Chef suprême des Forces Armées, Ministre de la défense nationale », à savoir Abdelaziz Bouteflika. Mais la Présidence de la République n’avait presqu’aucun droit de regard sur les tenants et aboutissants de l’organisation de cette cérémonie militaire.
Ainsi, c’est la première fois que cette cérémonie hautement stratégique pour l’armée algérienne est organisée au Palais du Peuple. Cela signifie que l’armée est placée sous la coupe de la… Présidence. Pour Abdelmadjid Tebboune, le message politique est clair : « Je suis le Président, je suis le patron ! » Si Gaid Salah était encore envie, cette cérémonie n’aurait jamais pu avoir lieu de cette manière et suivant ce nouveau protocole.
Et pour cause, les images diffusées et immortalisées par les caméras de l’ENTV montrent des ministres civils qui occupent les premiers rangs des festivités de cette cérémonie « militaire ». Quant aux hauts gradés de l’armée, ils sont assis derrière les ministres… civils. Un protocole inédit dans une cérémonie de remise de grades et de médailles aux officiers de l’Armée nationale populaire. Le militaire derrière le civil. La symbolique a été soigneusement étudiée par Tebboune. Et ce n’est pas uniquement de l’esthétique cinématographique car il y a bel et bien un message politique qui parvient à tous les esprits des connaisseurs de l’Algérie : la Présidence est la véritable institution détentrice du pouvoir en Algérie. Tebboune a-t-il donc pu dompter l’armée en un temps si court alors qu’il est au pouvoir depuis le 12 décembre 2019 ?
Les images de cette cérémonie militaire au Palais du Peuple tendent à répondre par l’affirmatif. Mais en Algérie, rien n’est stable et joué d’avance. Les images valent ce qu’elles valent, mais elles restent des images.
Il faut plus qu’une symbolique pour montrer que le pouvoir est véritablement entre les mains d’un Président civil dans cette Algérie complexe où le régime reste depuis de longues années en place grâce à son opacité bien entretenue…
