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mardi, juillet 2, 2024

En Algérie, la machine de la répression s’emballe à deux mois de l’élection présidentielle anticipée

Le directeur d’un site d’information algérien et son rédacteur en chef ont été arrêtés après la diffusion d’un reportage dans lequel des entrepreneurs du sud du pays critiquent les autorités, a indiqué vendredi une ONG de défense des détenus. Le directeur du site Algeria Scoop Omar Ferhat, connu sous le pseudonnyme de Karim Kaki, et son rédacteur en chef Sofiane Ghirous ont été placés jeudi en détention provisoire, a précisé le Comité national pour la libération des détenus (CNLD).

Selon cette source, ils ont été incarcérés après la diffusion par le site d’une vidéo montrant deux femmes du sud du pays, à la tête de jeunes entreprises innovantes, protestant contre leur «marginalisation» lors d’une cérémonie dédiée à la création organisée mardi à Alger et présidée par le ministre de la Formation et de l’enseignement professionnels Yacine Merabi. Les deux journalistes sont poursuivis pour «incitation au discours de la haine et propagation du discours de la haine», a ajouté le CNLD. Un troisième journaliste d’Algeria Scoop a été mis sous contrôle judiciaire. Pour rappel, selon le dernier classement de l’ONG Reporters sans Frontières, l’Algérie a reculé de trois places en 2024 en termes de liberté de la presse, se positionnant à la 139e place sur 180 pays audités. RSF a déploré «des médias indépendants sous pression» et des «menaces et interpellations» de journalistes pour «le simple fait d’évoquer la corruption ou la répression de manifestations».

Les journalistes ne sont pas la seule cible de la machine répressive du régime algérien. Des chanteurs, militants des Droits de l’Homme ou des activistes de l’opposition ont fait l’objet depuis le début de ce mois de juin d’arrestations musclées ou de plusieurs procès expéditifs ayant abouti à la prononciation à leur encontre de diverses peines de prison ferme. Le 27 Mai dernier, le militant Yacine Cheref, a été arrêté à son domicile d’Eucalyptus en banlieue d’Alger et perquisitionné par des membres de la DGSI. Il a par la suite été présenté au tribunal d’El Harrach et a été placé en détention provisoire par le juge d’instruction. Les accusations à son encontre sont liées à des publications qu’il aurait partagées sur les réseaux sociaux. Une fois de plus, ces accusations s’appuient sur l’article 87 bis du code pénal, et notamment « apologie du terrorisme ». Après un appel de la décision initiale, rejetée par la chambre d’accusation, celle-ci a de fait confirmé l’ordonnance du juge d’instruction. Il a été transféré de la prison d’El Harrach à la prison Koléa où il a rejoint un autre militant associatif âgé de 74 ans et atteint de plusieurs maladies chroniques qui sans bénéficier de la moindre pitié de la part du régime algérien. Il s’agit de l’ancien animateur de Berbère Télévision converti depuis des années en un militant et acteur culture de premier rang au sein de la diaspora algérienne à Paris, Mohand Taferka. Après sept mois de détention provisoire, le militant associatif de la diaspora, Mohand Taferka, a comparu le 25 juin dernier devant le tribunal criminel de Dar El Beida, à Alger. La décision du juge a été de le condamner à deux ans de prison ferme et une amende de 50 000 dinars pour « atteinte à l’unité nationale ». Le parquet avait requis contre lui une peine de quinze ans de réclusion criminelle. Son seul crime est d’avoir nourri des liens de proximité avec des militants du mouvement pour l’Autodétermination de la Kabylie (MAK), une organisation classée comme mouvement terroriste depuis mai 2021.

Une semaine auparavant, c’est le sort de l’artiste franco-algérienne, Djamila Bentouis qui a défrayé la chronique avec le premier report une première fois de son procès au 27 juin dernier en lien avec la chanson qu’elle avait composé en soutien au mouvement du Hirak. Le Tribunal de Dar el Beida à Alger a requis contre elle à une peine de huit ans de prison ferme, accompagnée d’une interdiction légale, soit la privation de l’exercice de ses droits civils. Le verdict final du procès aura lieu le 4 Juillet et sera très attendu par les militants des Droits de l’Homme car cette affaire, comme celles que nous avons cité précédemment, est un miroir reflétant les réelles intentions des dirigeants algériens concernant le traitement qu’ils veulent réserver aux libertés publiques et individuelles à la veille du scrutin présidentiel du 7 Septembre 2024. Pour rappel, l’artiste franco-algérienne, Djamila Bentouis, est en détention depuis début mars en Algérie pour « appartenance à une organisation terroriste » en lien avec une chanson qu’elle avait composée pendant le mouvement de contestation du Hirak. Djamila Bentouis, 60 ans, mère de trois enfants, était venue de France faire ses adieux à sa mère mourante et a été interrogée à son arrivée à l’aéroport d’Alger le 25 février puis de nouveau les jours suivants. Elle a ensuite été placée en détention le 3 mars 2024. Force est enfin de constater que la machine répressive du pouvoir algérien s’est nettement emballée à deux mois de la tenue des élections présidentielles anticipées du 7 septembre. Ce message est perçu par de nombreux opposants algériens comme un message direct que leur adresse le régime Tebboune : aucune contestation, contradiction ou remise en cause de sa légitimité ne sera tolérée. C’est donc dans un climat très liberticide que plus de 24 millions d’algériennes et d’algériens sont appelés à désigner leur futur Président de la République.

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