Numidia TV est une chaîne de télévision algérienne qui a fait peau neuve après avoir alimenté une vive controverse en 2014 lors de la campagne électorale pour les élections présidentielles où elle avait porté atteinte à de nombreux opposants et militants. Nous sommes partis à la rencontre de son jeune directeur qui tente d’imposer une mutation pour donner naissance à une nouvelle télévision porteuse d’un regard différent sur l’Algérie. Entretien.
Propos recueillis par Abdou Semmar
Zine Yousfi, vous êtes le directeur général de Numidia TV qui était anciennement Numidia News TV. Cette chaîne de télévision était très controversée et sulfureuse en raison de ses manquements à la déontologie. Aujourd’hui, quel est le nouveau visage de Numidia TV ?
Bonjour Abdou, oui, en tant que DG de Numidia TV, je souhaite insister sur le changement d’identité de la chaîne. Comme vous l’avez signalé, Numidia TV aujourd’hui n’a plus aucun lien avec Numidia News et sa réputation sulfureuse.
Aujourd’hui, Numida TV est une chaîne de télévision professionnelle qui se base sur une vraie stratégie de l’audiovisuel, avec un nouveau staff, un nouveau cœur de cible, une ligne éditoriale affinée et recentrée, avec pour premier objectif et centre d’intérêt : parler aux téléspectateurs, aux concitoyens.
Numidia TV est une chaîne de télévision citoyenne, qui a une responsabilité dans la diffusion de son contenu. Nous travaillons pour proposer à nos téléspectateurs un contenu à la fois responsable et progressiste sans systématiquement avoir recours au sensationnalisme, avec un respect des règles d’éthique et de déontologie.
Parlez-nous de votre parcours et de votre expérience professionnelle ? Et quel regard portez-vous réellement sur le paysage audiovisuel algérien ?
J’ai été diplômé d’un Master 2 d’Ecole de Commerce à l’INSEEC Paris, spécialisé en Management International et en Entrepreneuriat. Après divers expériences à l’international en France, et en Espagne notamment dans le domaine du digital, et du management de structures, j’ai décidé de rentrer au pays pour participer à la construction du début de quelque chose dans mon pays natal.
J’ai, d’abord, commencé pendant près d’un an en tant que journaliste de la rubrique français de Numidia, en étant rédacteur en chef et présentateur de mon journal télévisé, tout en suivant en parallèle plusieurs formations dans le domaine des médias :management général d’une chaîne de télévision, journalisme, production et acquisition, programmation d’une chaîne de télévision généraliste et thématique, création d’un média digital, statistiques appliquées à la télévision, etc…
Mon regard sur le paysage audiovisuel algérien est optimiste et sur l’Algérie en général. Nous vivons dans un pays qui a 55 ans d’existence et qui dispose d’une histoire somme toute jeune, avec les différentes périodes tragiques de notre histoire qui ont mis un frein à certaines dynamiques au début des années 1990.
Nous sommes au début de la (re)création de valeur dans plusieurs domaines : industrie, TIC, agriculture, tourisme mais aussi dans le domaine des médias qui est un des domaines les plus jeunes avec 5 années de privatisation seulement. L’émergence des chaines privées est l’occasion d’asseoir une signature stratégique propre à chaque média qui pourra créer la différence.
Je pense qu’il y a de la place pour tout le monde dans dans ce que j’appelle le P2A ( Paysage Audiovisuel Algérien), le tout est d’avoir une stratégie, une identité et une ligne éditoriale bien identifiée et claire.
Quelles sont aujourd’hui les ambitions de Numidia TV ? Quelle est sa ligne éditoriale et quel public visez-vous ?
Numidia TV est une chaîne de télévision fédératrice, familiale avec pour cœur de cible un public jeune adulte. En termes de ligne éditoriale, Numidia TV est en scission totale avec ce qu’à pu être Numidia News. Nous considérons qu’il est important de proposer un contenu fédérateur, progressiste. C’est une chaîne citoyenne, qui a pour ambition de répondre aux besoins et attentes du téléspectateur algérien, en lui proposant un contenu qui le représente, de qualité, et dans l’ère du temps.
Numidia TV vise un public large en proposant un discours constructif et positif et critique sur des sujets sociaux, sociétaux, politiques, économiques, culturels, sportifs etc…
Nous visons tous les téléspectateurs algériens qu’ils soient en Algérie, où à l’étranger avec notre diaspora en France, au Canada et ailleurs. Pour rappel, nous sommes présents sur le Satellite Nilesat, nous avons une nouvelle fréquence sur le satellite Eutelsat 7 W 10922 V 27500 et nous sommes aussi présents sur la Freebox, canal 550. Vous pouvez aussi suivre de manière continue Numidia TV sur les 4 coins du globe avec la rubrique “ Live” sur notre site internet www.numidiatv.tv, et regarder l’ensemble de nos émissions de ce mois de Ramadhan quelques minutes après la diffusion sur l’onglet Replay.
Comment avez-vous élaboré la grille de ce mois de Ramadhan 2017 ? Quelle stratégie avez-vous dessiné pour résister aux autres chaînes privées ?
La grille de ce mois de Ramadhan 2017 a été élaborée a la suite d’une étude pour identifier les besoins réels et envies du cœur de cible de nos téléspectateurs, qui est un public jeune adulte.
Nous avons identifié 3 sitcoms : Tlak sur mesure, Ana W marti et Zohir pas de chance. Chaque sitcom correspond a une cible précise selon sa disposition dans la grille des programmes, et les 3 répondent à un cahier des charges rigoureux tant sur le plan technique qu’artistique.
Tlak sur mesure est un programme fédérateur visant un public familial, promouvant les valeurs algériennes dans une société en pleine mutation, qui a pour sujet principal le divorce et les répercussions sur les liens familiaux de manière humoristique avec en tête d’affiche Hamid Achouri, et Nora Benzerari.
Le second sitcom, Ana W Marti, traite d’un autre fait de société qui met en avant de manière toujours humoristique la vie de couple d’un célibataire endurci, avec pour tete d’affiche Kamel Bouakkaz, mais aussi Farida Krim “Khalti Boualem”, dans le role de la mere.
Enfin, le 3ème sitcom, est un autre sujet sociétal : Zohir pas de chance, qui met en avant la vie d’un demandeur d’emploi un peu simplet, dans une société en pleine mutation et qui attribue ses déboires au manqué de chance “ Ma 3andich Zhhar”, avec une réalisation de qualité signée Nassim Boumaiza, et un génie dans l’incarnation du role de Zohir, par Amine Boumedine.
Vous noterez un choix éditorial important avec l’absence de camera cachée pour plusieurs raisons. Nous avions travaillé sur un projet avec un prestataire externe que nous avons choisi de ne pas diffuser car ne répondant pas aux normes techniquement et artistiquement. Nous prenons l’engagement de proposer des produits de qualité vis-à-vis de nos téléspectateurs., ainsi qu’un respect de l’éthique et de la déontologie dans le contenu de nos programmes.
– Et que pensez-vous de ces sondages et études qui vous attribuent des parts d’audience faibles ?
Sur ce sujet, j’ai une approche statistique purement mathématique et scientifique. Les instituts de sondage aujourd’hui emploient des méthodes de mesure d’audience et échantillonnage qui sont dans l’incapacité de traduire une vérité statistique sur les audiences, mais plus une présupposée tendance.
Les instituts de sondage effectuent leurs mesures et leur échantillonnage sur une population urbaine, en excluant totalement la population rurale qui est déconsidérée. Sur cette population urbaine, ils n’appliquent une mesure que sur 7 à 8 villes algériennes maximum, et sur un même échantillon à chaque fois.
C’est-à-dire que les études ne mesurent pas la consommation télévisuelle des habitants des 48 wilayas algériennes, mais seulement de 7 à 8 VILLES algériennes, pour être clair.
Nous savons que l’échantillon est non-représentatif ce qui donne des études biaisées. Par exemple, le premier jour des sondages du début du mois de Ramadhan, l’échantillon collectée chez les agences de sondage était de 200 et 300 personnes avec une marge d’erreur de 5 à 10 %.
La méthode d’enquête par téléphone ou en questionnaire est également non représentative, elle prend pour base une audience calculée sur le quart d’heure alors que dans le paysage audiovisuel d’autres pays, l’audience est calculée à la seconde.
Pour en revenir à la marge d’erreur, nous allons illustrer ça par un exemple : une marge d’erreur de 5% sur une une audience de 20 millions de téléspectateurs et un marché publicitaire de 10 milliards de dinars traduit un flottement d’1 million de téléspectateurs et 500 millions de dinars, ce qui représente, un objectif à atteindre pour une majeure partie du P2A. Ce système empêche des chaînes de télévision quelles quelles soient d’émerger.
Je dirais même plus. Aujourd’hui, nous vivons dans un monde où la consommation de la télévision est totalement dé-linéarisée, c’est-à-dire que le téléspectateur ne regarde pas la télévision seulement, mais il s’appuie sur les divers médias sociaux : Facebook, Youtube, un live sur un site internet, ou d’autres techniques de catch-up.
Aujourd’hui par exemple, chez Numidia TV, nous avons Presque 1 million de followers sur Facebook qu’on ne retrouve pas dans les rapports des instituts de sondage alors que notre coeur de cible sur notre télévision et sur nos médias sociaux est le même.
Donc c’est une autre audience à cumuler, et un nouvel outil de mesure qui est considéré par toutes les agences de médiamétrie mondiale, et qui est totalement ignorée dans notre pays. Pendant que d’autres pays s’actualisent et vivent selon leur époque en s’actualisant aux nouvelles techniques, nous restons sur une mesure d’audience qui n’en est pas réellement une en vérité, mais qui s’apparente plus au sondage d’opinion reposant sur une liste de facteurs pas forcèment objective.
A titre d’exemple, rappelons que dans d’autres pays, ce sont des boîtiers électroniques qui donnent une indication précise sur l’audience totalement électronique sans aucune intervention ni altération possible par des facteurs humains et subjectifs.
Je prends un autre exemple où Numida TV a participé cette année à une compétition internationale de chaîne de télévision : les Eutelsat TW Awards, où nous avons sollicité la participation de notre public, dans un vote pour un produit que nous avions mis en compétition. Dans notre catégorie qui s’appelait les “ People’s Choice Award” , nous avons atteint la 2e place derrière la télévision sénégalaise 2STV, parmi une cinquantaine de télévision européennes, africaines, et du Moyen-Orient.
En tant que dirigeant de chaîne de télévision, je souhaite apporter de meilleures réponses aux téléspectateurs algériens et disposer d’outils de mesure plus fiables.
– Et si vous avez enfin un seul mot à dire aux Algériens pour les convaincre de suivre votre chaîne de télévision, que leur diriez-vous ?
Numidia TV est une chaîne de télévision qui propose un contenu tout public, avec un respect de l’éthique de la déontologie, des valeurs familiales, des valeurs sociétales et morales algériennes. Numidia T est une chaîne qui se veut à l’écoute du téléspectateur, et qui répond à ses attentes.
Nous sommes une chaîne de télévision qui vit selon son époque, qui souhaite proposer une offre multi-supports, à travers la chaîne de télévision et ses médias sociaux.
Nous sommes en pleine mutation et notre politique est de toujours faire mieux que la veille en proposant des contenus novateurs, de qualité, sensibilisateurs et éducatifs, plein de positivisme.
Regarder Numidia TV, c’est partager des ondes positives, c’est s’informer, se divertir, tout en restant connecté, et l’assurance de proposer des contenus de qualité avec de l’humour, de la culture, du divertissement, du sport mais aussi des sujets d’actualité, de politique et d’économie. Un grille variée adaptée à nos téléspectateurs.