Si en Algérie, personne ne s’attendait à ce que le mouvement populaire du 22 février 2019, alias le Hirak, bouleverse toutes les données politiques du pays, à l’étranger, certains cabinets d’études spécialisés avaient prévu des « troubles majeurs » annonciateurs de grands changements en Algérie. C’est le cas du Groupe Atradius, l’un des leaders de l’assurance en Espagne et de l’assurance-crédit dans le monde. Atradius est le n°2 mondial de l’assurance-crédit. Basé au Pays-Bas, ce groupe est dominé par des actionnaires espagnols alors qu’il s’occupe officiellement de l’assurance-crédit à l’exportation au nom de l’État néerlandais.
Dans son rapport international consacré à la région Afrique du Nord et Moyen-Orient (MENA), publié en juillet 2018, Atradius avait explicitement expliqué que si « la sécurité interne reste stable » en Algérie, « les principaux manquements du gouvernement (clientélisme endémique, niveau de chômage élevé, manque de logements abordables et augmentation du coût de la vie) et son succès tout relatif dans la diversification de l’économie augmentent le risque de troubles sociaux, en particulier chez les jeunes. Dans le même temps, le risque d’attaques terroristes a progressé en raison des troubles politiques actuels dans les pays voisins que sont la Libye et le Mali ».
Mieux encore, ce rapport internationale passé inaperçu à l’époque avait planché sur la crise de succession d’Abdelaziz Bouteflika en mettant en garde contre les dangers que cette crise allait engendrer pour l’Algérie. « Le pouvoir politique réside dans les mains du président Bouteflika, qui a 81 ans et dont la santé n’est pas particulièrement bonne. Aucun successeur manifeste n’est pressenti et une démission de Bouteflika avant la fin de son mandat en 2019 exacerberait assurément les tensions au sein de l’élite politique. Les pouvoirs de l’Assemblée nationale sont encore limités en dépit des certains amendements constitutionnels visant à améliorer la transparence et à renforcer les éléments démocratiques », explique-t-on dans ce rapport international qui a passé également au peigne fin la situation alarmante de l’économie algérienne.
Une économie qui peine à se diversifier en raison de « l’intervention publique (l’on estime que 90 % du PIB de l’Algérie est encore contrôlé par l’État), la bureaucratie, la corruption, l’accès limité au financement et la rigidité du marché du travail freinent toujours les initiatives émanant d’entreprises privées et les investissements étrangers, ralentissant une transition économique nécessaire. Le poids de la politique fiscale et les pressions sur le financement interne pourraient être allégés si le gouvernement décidait de commencer à emprunter sur le marché international », note enfin Atradius dans son rapport.