Alors que l’Algérie a plus que jamais besoin d’investisseurs pour se relancer économiquement, des tensions politiques au sommet de l’Etat paralysent des grands projets industriels. Preuve en est, les 49 nouveaux parcs industriels qui doivent accueillir des usines à travers 39 wilayas n’ont toujours pas vu le jour.
L’édification et l’aménagement de ces zones industrielles est en suspens depuis 2014. Il s’agit d’un projet qui englobe un budget de 3 milliards de dollars. Gelés en raison de la crise financière paralysant le pays, ces parcs industriels cachent en réalité d’autres enjeux politiques, a-t-on appris suite à nos investigations.
Sella Vs Bouchouareb
A partir de 2014, plusieurs entreprises publiques et privées ont été sélectionnés pour réaliser ces zones industrielles comme il est indiqué sur le site internet de l’ANIREF. Or, d’après nos recherches, l’Agence Nationale d’Intermediation et de Régulation Foncière (ANIREF) a été, par la suite, instruite de suspendre ses « attributions provisoires ». Début 2016, un conflit ouvert éclate entre le Sellal, premier-ministre à l’époque, et son ministre de l’Industrie, le fameux Abdesslam Bouchouareb.
Entre les deux hommes, le courant ne passe pas et chacun essaie de torpiller l’autre en le poignardant dans son dos. Sellal prétexte les accusations de favoritisme colportées par des opérateurs économiques pour suspendre ces projets. Bouchouareb a été, effectivement, accusé d’offrir les marchés de réalisation de ces parcs industriels à ses « copains » hommes d’affaires comme les familles Hasnaoui et Kouninef. La polémique fait rage et le directeur de l’ANIREF, Hacène Hammouche, est convoqué dans le bureau de Sellal.
Le jeune directeur de 36 ans sort tous ses dossiers et démontre qu’il n’a fait que respecter la loi en vigueur. Les critères de sélection des bénéficiaires de ces marchés sont stricts et excluent de fait les entreprises qui n’ont pas la taille des richissimes groupes privées membres du FCE d’Ali Haddad.
La Cour des Comptes dépêche une inspection à l’ANIREF et les juges ne découvriront absolument rien d’illégal. L’Inspection Générale des Finances (IGF) se rend également dans les bureaux de l’ANIREF. Et à la fin de leur enquête, les agents de l’IGF félicitent… Hacène Hammouche. Le dossier n’est pas clos pour autant puisque avec le départ de Sellal, Abdelmadjid Tebboune va encore chambouler la situation.
Tebboune remet catégoriquement en cause les décisions de ses prédécesseurs et réduit le nombre de ces parcs industriels. Le programme est ralenti et menacé de disparition à cause de la crise financière. En attendant plusieurs anomalies sont constatées sur le terrain. A Relizane, Sovac obtient bel et bien un terrain pour son usine de montage de véhicules avec le groupe Volkswagen. Or, ce terrain est situé dans une zone industrielle qui n’a pas encore été aménagée et dépourvue du moindre équipement ! A l’ANIREF, on jure que la gestion de ce dossier échappe entièrement à son contrôle.
Une inquiétante instabilité politique
Et au niveau de la wilaya de Relizane, on nous explique que la zone industrielle n’a pas été construite faute d’une autorisation du ministère de l’Industrie. Des cas similaires sont signalés un peu partout à travers le pays. Les décisions sont bloquées en raison des conflits entre les ministres du gouvernement. Et à l’arrivée de chaque nouveau ministre, le projet de son prédécesseur est torpillé. Bouchouareb, Bedda et ensuite Youcef Yousfi, en quelques mois, le ministère de l’Industrie a connu trois ministres différents et chacun d’entre eux obéit à un agenda différent. Et à la tête du gouvernement, l’instabilité est encore plus grave. Lorsque Tebboune bloque, Ouyahia débloque. Et chacun privilégie ses intérêts politiques au détriment des besoins économiques de l’Algérie. Aujourd’hui, personne ne peut donner une vision claire au sujet de l’avenir de ces parcs industriels. Triste réalité dans un pays où un investisseur cherche désespérément un lot de terrain pour bâtir une usine qui va créer des emplois et des richesses.