Merzak est originaire d’Alger, il y a deux ans il a décidé de quitter son pays pour tenter sa chance en France. « J’ai marché d’Alger à ici, » explique-t-il. Il est passé par la Turquie, la Grèce, la Macédoine et a continué pour à arriver jusqu’à Athis-Mons.
En partant, il a laissé dernière lui toute sa vie. « Partir c’était une bêtise, parce que j’ai laissé ma mère. »Sa mère, c’est ce qui revient le plus souvent dans le discours de Merzak. « Elle ne voulait pas que je parte en disant que la route était trop dangereuse. »
Elle avait peur pour son fils qui a « vu la mort » sur le bateau de la Turquie à la Grèce. « La route est tellement dangereuse, tout ce qu’on pense à ce moment-là c’est pourquoi ? Pourquoi s’infliger ça ? »
Les raisons, on peut les comprendre en écoutant son récit de vie. « J’ai grandi sans mon père, ma mère m’a élevé seule. Il s’est marié après avoir connu ma mère, et a fondé une famille, a eu d’autres enfants. Je n’ai connu la famille de mon père qu’à quinze ans, et j’étais heureux de partir à la rencontre de cette partie de moi que je ne connaissais pas, » raconte-t-il. Sa mère et lui n’ont jamais eu beaucoup d’argent.
Du côté de son père, le destin a été plus favorable. Sa famille est riche, il tient une société qui vend des équipements de bricolage, les demi-frères de Merzak travaillent avec lui. Les filles se sont quant à elles mariées.
« Avec ma mère nous n’avons pas vécu cela. Mon père n’a jamais payé les allocations, mais ma mère ne les voulait pas de toutes les façons. Elle voulait qu’on se débrouille seuls. Et c’est ce que l’on a fait. C’est ce que je continue à faire aujourd’hui. » Face à ses demi-frères et sœurs, qui ont plus de chance, il ne ressent ni colère, ni de jalousie. « Ce sont mes frères et sœurs et je suis content pour eux, » déclare-t-il. Il ajoute également : « je suis fière de ma mère, elle était enseignante pendant trente-six ans, et moi j’étais fils de prof, c’est un beau statut. » Malgré les difficultés, Merzak est fier de là d’où il vient.
Il a tout de même rencontré beaucoup d’obstacles, notamment parce que le contexte économique et sociale de l’Algérie ne lui a pas été favorable. « En Algérie j’ai fait un baccalauréat option mathématiques et j’ai étudié l’architecture. Mais impossible de trouver un emploi dans cette branche. J’ai fait des petits boulots en tant que vendeur et chauffeur, mais je n’ai pas obtenu un diplôme pour faire ces métiers ! », s’agace-t-il. « Tout marche au piston là-bas, et moi je n’en ai pas. »
Si le facteur économique explique son départ, il n’est pas le seul. Merzak voulait aussi voir comment la vie était ici, en France : « découvrir une autre partie du monde, tenter ma chance. » Alors il a laissé derrière lui sa mère, ses amis d’enfance, la vie qu’il connaissait pour voir ce que l’Europe avait à lui offrir. « On se demande toujours pourquoi on fait ça, alors on garde espoir et on se dit qu’au bout du chemin, la galère ne sera plus là. »