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vendredi, avril 19, 2024

Exclusif. Manoeuvre dangereuse et inédite du gouvernement algérien : placer l’ANPP sous la tutelle du ministère de l’Industrie pharmaceutique

Le contrôle de l’Agence nationale des produits pharmaceutiques (ANPP) est au coeur de toutes les convoitises en Algérie. Le 13 août prochain, le gouvernement algérien doit se prononcer sur l’adoption d’un projet de loi dangereux et inédit dans l’histoire du pays puisqu’il s’agit de détacher l’ANPP du ministère de la Santé, sa tutelle classique et légitime, pour la placer sous l’autorité du ministère de l’Industrie pharmaceutique dirigé en ce moment par Lotfi Benbahmed, ancien président du Conseil National de l’Ordre des Pharmaciens et ancien commerçant dans la distribution en gros des produits pharmaceutiques. Un homme fortement lié aux businessmans du secteur de la pharmaceutique comme il avait été démontré précédemment dans les enquêtes d’Algérie Part. 

Il faut savoir que ce ministre est le propriétaire de Scala Pharm, une société spécialisée dans la distribution en gros des médicaments et produits pharmaceutiques. Située à El-Biar (Alger), il s’agit de l’une des plus importantes sociétés de distribution des produits pharmaceutiques en Algérie auprès de laquelle s’approvisionne de nombreux clients et sociétés. Lotfi Benbahmed est également actionnaire d’une mystérieuse entreprise qui réalise des études de marchés dans le secteur pharmaceutique et du médicament. Cette entreprise s’appelle la Sarl Heat Care Business Intelligence. Basée à Alger-centre, elle a été créée le le 23 juin 2019. L’actuel ministre chargé de l’industrie pharmaceutique a créé cette entreprise avec trois autres associés dont l’un réside en France.

Il s’avère ainsi que ce ministre est donc très bien introduit dans le monde des affaires dans le secteur pharmaceutique. Et malgré cette proximité troublante, il a pu convaincre le gouvernement algérien d’étudier un nouveau projet de loi qui permet de retirer l’ANPP au ministère de la Santé pour la placer sous l’autorité du ministère de l’Industrie pharmaceutique. Ce qui constitue une anomalie inquiétante car la quasi-majorité des pays du monde entier les agences spécialisées dans le contrôle des médicaments ou des produits pharmaceutiques sont rattachées aux ministères de la Santé ou jouissent d’une totale autonomie administrative et financière leur permettant de disposer d’une véritable indépendance qui les protège contre l’influence malsaine de l’industrie pharmaceutique laquelle défend naturellement des intérêts mercantiles.

L’enjeu est majeur et énorme dans ce dossier car l’ANPP est l’entité qui enregistre les médicaments qui sont commercialisés en Algérie et délivre également les homologations des médicaments ou des dispositifs médicaux fabriqués localement ainsi que les fameuses Autorisations de mise sur le marché (AMM) indispensables à la commercialisation tout produit pharmaceutique en Algérie. Il s’agit d’une mission très sensible qui relève de la défense de l’intérêt général et de la préservation de la santé publique.

Dans les pays développés, de telles agences sanitaires sont totalement indépendantes de l’influence des laboratoires ou grosses sociétés de production des médicaments. C’est, pour cette raison, qu’elles sont rattachées au ministère de la Santé ou elles jouissent d’une complète et entière autonomie comme par exemple l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) en France. C’est un  Établissement public à caractère administratif affilié au ministère de la santé mais dont  le conseil d’administration est largement ouvert aux représentants des citoyens, des patients et des professionnels de santé.

Aux Etats-Unis, La Food and Drug Administration (FDA, à savoir l’Agence américaine des produits alimentaires et médicamenteux, est également dépendante du département de la Santé et des Services sociaux des États-Unis. L’Algérie sera l’un des rares pays au monde qui confie ainsi une agence nationale de contrôle des médicaments à un ministère de l’Industrie pharmaceutique directement lié aux intérêts des entreprises privées et étrangères. De la pure inconscience surtout lorsqu’on sait que pour retirer l’ANPP au ministère de la Santé afin de la confier au département du businessman Lotfi Benbahmed,  les autorités algériennes vont passer par un projet d’ordonnance présidentielle que devra adopter le 13 août prochain le gouvernement algérien. Cela signifie que la Présidence algérienne a d’ores et déjà donné son quitus. De l’irresponsabilité à l’état pur.

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