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vendredi, mars 29, 2024

Exclusif. Le défaut de maintenance à l’origine des fuites de pétrole au niveau des deux pipelines de Sonatrach

Un grave défaut de maintenance est à l’origine des fuites de pétrole survenues jeudi au niveau de deux pipelines dans la région de Baaj, dans la Wilaya d’El Oued, a appris Algérie Part au cours de ses investigations. Ces incidents n’ont absolument aucun lien avec un acte de sabotage ou de vandalisme comme il a été rapporté par certains médias sociaux en Algérie, a-t-on constaté au cours de nos investigations. Plusieurs sources bien introduites au sein de Sonatrach ont confié à Algérie Part que la surveillance de ces pipelines n’était pas du tout régulière et permanente ni conforme aux normes de sécurité en vigueur dans le secteur du transport des hydrocarbures par canalisations. 

Selon les premiers éléments recueillis par des inspecteurs et les techniciens dépêchés par la Sonatrach sur les lieux des deux incidents, ces fuites de pétrole ont été provoquées par les intempéries qui ont affecté les wilayas du sud du pays ces trois derniers jours. Les fortes pluies qui se sont abattues sur la wilaya d’El-Oued ont provoqué des inondations où des torrents de boue ont tout emporté dans leur passage y compris des gros cailloux qui ont abimé dangereusement le tube Ok1, dans la région de Baaj (W d’El Oued), reliant le bassin rouge (Hassi Messaoud) au port pétrolier de Skikda.

C’est dans ces conditions que la première fuite a été enregistrée à la sortie de la station de pompage SP2 à Djaamaa, dans la commune d’El Oued. Quant à la deuxième fuite, elle a été, enregistrée au point PK 263 dans la région d’Al-Baaj, dans la wilaya déléguée d’El M’gheir.

Selon nos sources, la direction chargée de l’Activité Transport par Canalisation, est pointée du doigt dans ce dossier parce qu’elle ne réalise pas les travaux d’inspection de tous les pipelines dont elle a la responsabilité de les surveiller. Le manque d’entretien de ces pipelines peut provoquer de graves incidents car il s’agit d’équipements industriels très sensibles. Malheureusement, la direction générale de Sonatrach n’a pas entamé des missions d’entretien au niveau de ces deux segments, touchés par les fuites de pétrole hier jeudi, du pipeline reliant Hassi-Messaoud à Skikda depuis bientôt 20 ans ! Oui, pendant toutes ces longues années, les équipes de maintenance de la direction en charge de l’activité Transport par canalisation (TRC) n’ont pas assuré comme il se doit la surveillance de l’intégralité de leurs activités pipelinières. « Les hauts responsables de Sonatrach auraient dû envoyer une patrouille au sol pour inspecter les pipelines dans les régions affectées par des fortes intempéries. C’est un dispositif de contrôle et de prévoyance obligatoire pour veiller sur la sécurité de ces canalisations », explique un ancien haut responsable de l’activité TRC de Sonatrach.

« Ailleurs, dans le monde, les compagnies pétrolières les plus sérieuses qui exploitent des réseaux importants de pipelines mettent en place des protocoles de sécurité très stricts.  Tout le matériel disposé le long du pipeline est soigneusement inspecté et entretenu — de l’extérieur comme de l’intérieur. Par exemple, on inspecte régulièrement l’intérieur des pipelines à l’aide de jauges d’inspection de pipelines, aussi connues sous le nom de racleurs intelligents. Il s’agit de machines très sophistiquées équipées de systèmes de repérage par GPS et de capteurs », explique encore notre interlocuteur d’après lequel l’actuelle équipe dirigeante en charge de l’activité TRC de Sonatrach a failli à son devoir en manquant cruellement de vigilance.

« Dans ce domaine, il faut détecter rapidement les anomalies pour les réparer en urgence afin d’éviter des catastrophes naturelles et environnementales sans oublier les immenses pertes financières des fuites de pétrole », relève encore l’ex-haut responsable de Sonatrach contacté par nos soins.  Il est à souligner que le pipeline est un moyen de transport qui reste un des plus économiques – par rapport aux camions ou aux trains – et des plus sécuritaires. À partir du moment où celui-ci est bien conçu et bien enterré, il peut fonctionner pendant 40 ou 50 ans, voir plus, en véhiculant en permanence les fluides. À condition de l’entretenir…

Afin de garantir la bonne tenue du réseau, il est nécessaire de réaliser une épreuve sous pression tous les 5 ou 10 ans. En quoi cela consiste-t-il ? À la fin de construction d’un ouvrage, on le remplit d’eau et on le teste en pression à, en général, 150 % de la pression d’exploitation à laquelle il va être soumis, que ce soit un oléoduc ou un gazoduc. Les gazoducs, eux, sont ensuite vidangés et séchés avant d’être mis en œuvre. En cas de scénario catastrophe, comme il peut arriver des dégâts à l’environnement, les tests sont effectués avec de l’eau. Lourd de conséquence, ces tests impliquent d’arrêter l’exploitation plus longtemps, trouver de l’eau en quantité suffisante et la retraiter. Il existe plusieurs technologies et méthodes pour entretenir ou inspecter les pipelines.

Malheureusement, la direction actuelle en charge de l’activité TRC de Sonatrach est chapeauté par un haut responsable qui n’a strictement aucun lien avec ce domaine très technique et pointu. Depuis le 30 mars dernier l’activité TRC de Sonatrach est dirigé par un nouveau vice-président désigné par le PDG de Sonatrach, Toufik Hakkar, et nommé à la suite d’un décret présidentiel du Palais d’El-Mouradia. Ce nouveau vice-président s’appelle Melaika Amine. Ce nouveau cadre dirigeant est, certes, jeune puisqu’il est âgé d’à peine 46 ans. La promotion des cadres est effectivement à saluer.

Cependant, force est de constater que MELAIKA Amine n’a strictement aucune connaissance de l’activité TRC. Ce département stratégique de Sonatrach a pour missions de développer le réseau d’infrastructures de Transport par Canalisations, de Stockage, de Chargement et Déchargement à travers les infrastructures portuaires à quai et en haute mer. L’activité TRC a également pour mission d’assurer le transport des hydrocarbures depuis les pôles de production au sud vers les pôles de demande et de transformation au nord (marché national et exportation).

Ces missions exigent un background, un parcours et des formations spécifiques compte tenu des spécificités techniques de ce secteur clé des hydrocarbures. Or, monsieur MELAIKA Amine est uniquement titulaire d’une licence en sciences économique- option gestion de l’Université d’Alger. Il est, certes, également titulaire d’une Post-Graduation spécialisée en audit interne de l’Ecole des Hautes Etudes Commerciales (EHEC) et d’un Executive Master Business Administration (EMBA) de l’Ecole Supérieure Algérienne des Affaires « ESAA » en consortium avec HEC/Paris.

Mais sa formation n’a strictement aucun lien avec la production et le transport des hydrocarbures, des domaines purement technique totalement différent du secteur de l’audit ou de la gestion dans lequel est spécialisé le nouveau Vice-Président de Sonatrach.

En plus, le dernier poste de Melaika Amine est responsable de l’audit en charge des Méthodes du Développement et du Reporting au niveau de la Direction Générale de SONATRACH. Il était égalementDirecteur Général du Holding Services Pétroliers & Parapétroliers (SPP) en charge du portefeuille des Filiales (ENTP, ENAFOR, ENSP,
ENAGEO, GCB, ENGTP, ENAC, SAFIR) et des joint-ventures « Schlumberger, General Electric (GE), Baker Hughes, Haliburton, etc.

C’est donc un pur gestionnaire et auditeur dont la formation et le métier est de gérer des administrations ou de contrôler les dépenses ainsi que les états financiers d’une société. Malheureusement, les activités purement techniques du réseau de transport des hydrocarbures de leur stockage ne relèvent pas du tout des compétences de Melaika Amine. Cette méconnaissance criante de ce secteur particulier conduit Melaika Amine a commettre de graves erreurs de gestion. Des erreurs qui peuvent causer des drames industriels comme ces deux fuites de pétrole dans la wilaya d’El-Oued. Algérie Part poursuit ses investigations et reviendra sur ce dossier dans ses prochaines publications avec de nouvelles révélations.

 

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