Le gaz de schiste algérien rend fou les plus grosses compagnies pétrolières mondiales. Les propositions les plus folles continuent de pleuvoir sur le bureau du PDG de Sonatrach, Abdelmoumen Ould Kaddour. Et après la compagnie Anardarko qui a proposé de mettre sur la table pas moins de 90 milliards de dollars pour exploiter les riches réserves algériennes du gaz de schiste, c’est au tour de BP et de Statoïl de sortir leurs chéquiers pour séduire l’Algérie.
La compagnie britannique BP n’a pas lésiné sur les moyens et a fait miroiter à l’Algérie un investissement de 50 milliards de dollars. Quant aux norvégiens de Statoil, ils sont prêts à procéder à une levée de fonds qui peut rassembler également pas moins de 50 milliards de dollars, a-t-on appris suite à nos investigations. Les deux compagnies, deux mastodontes de l’énergie, proposent ainsi 100 milliards de dollars pour obtenir les permis d’exploration et d’exploitation des réserves de gaz de schiste en Algérie.
Il s’agit d’investissements qui vont s’étaler sur plusieurs années pour transformer le gaz de schiste en une véritable nouvelle richesse pour le pays. Selon nos investigations, pour rassurer les autorités algériennes qui s’inquiètent de la réaction de l’opinion publique nationale à propos des conséquences environnementales, notamment sur les nappes phréatiques, BP et Statoil ont promis que la technique de la fracturation hydraulique de la roche pour récupérer le gaz sera encadrée.
Pour le moment, aucune réponse officielle n’a été donnée par l’Algérie à ces compagnies internationales qui font la danse du ventre à notre pays. Toute exploitation ou exploration du gaz de schiste ne sera possible que si l’actuelle loi sur les hydrocarbures est entièrement révisée. Or, ce chantier politique est toujours en cours.
Cependant, il faut noter qu’en Algérie, après une courte période d’accalmie, le débat sur l’exploitation du gaz de schiste reprend. Et contrairement l’origine de la polémique n’est pas sortie d’Algérie, mais de France.
Une députée du parti de la gauche, la France insoumise que préside le très polémiste Jean-Luc Mélenchon, a en effet révélé dans un courrier adressé à Nicolas Hulot, ministre de la transition écologique, que le gaz qui coulera dans le gazoduc que les autorités françaises feront passer par la région es Pyrénées proviendrait d’Algérie. « Le gaz prévu pour passer dans ce tuyau proviendra essentiellement d’Algérie et ce pays possède la 3e réserve mondiale estimée de gaz non conventionnels. Comme la ministre le sait, l’extraction des gaz s’effectue déjà en Algérie par la fracturation hydraulique », écrit parlementaire dans une lettre publiée par le site de l’Assemblée nationale française.
Muriel Ressiguier, député de l’Hérault, appelle le gouvernement français à « envisager l’abandon ou un moratoire de ce nouveau projet anti-écologique ». Elle estime qu’il serait inacceptable que « les pays de l’Union européenne n’autorisant pas chez eux l’extraction des gaz de schiste à cause des multiples risques que cela induit se tournent vers l’Algérie pour le produire, en laissant supporter à ce pays les risques et les aberrations écologiques qui sont liés à ce type d’extraction ».
Ce rappel est d’une importance capitale. Car, sous la pression des militants écologistes, les autorités françaises ont imposé un moratoire à l’exploitation du gaz de schiste.
Du coté algérien, il n’y a pas encore de réaction officielle. Seul l’ancien PDg de Sonatrach, Nazim Zouiouèche a précisé dans un site que la députée française confondait tout puisque la Sonatrach fait déjà de la fracturation hydrique depuis les années 1970.
Mais si on suit les récentes déclarations des responsables du pays, on se rend compte que finalement tout est possible. « Il est temps que Sonatrach exploite toutes ses énergies au service de l’entreprise et du pays », avait déclaré Ouyahia lors d’une visite dimanche à la raffinerie d’Arzew. Le Premier ministre a notamment « encouragé » les dirigeants du groupe pétrolier à « investir dans le domaine du gaz de schiste ». «Il ne s’agit pas là d’une démarche aventurière, mais d’une option visant à garantir l’avenir en matière énergétique», a-t-il expliqué.
Cette nouvelle confusion rappelle les manifestations organisées en 2015 par la population de la ville de In Salah qui s’opposait à l’exploitation du gaz de schiste. A l’époque, Sonatrach effectuait seulement des travaux d’exploration.