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vendredi, mars 29, 2024

Exclusif. 3 importants projets gaziers à l’arrêt provoquant d’énormes pertes financières pour l’Algérie

Au moins deux importants projets gaziers sont à l’arrêt en Algérie depuis presque deux ans alors qu’un autre projet gazier fonctionne à peine à hauteur de 50 % de son véritable potentiel de production, a pu confirmer Algérie Part au cours de ses investigations. L’immobilisation de ces projets gaziers a provoqué une perte de production évaluée à près de 8 milliards de m3. Une quantité considérable qui se répercute très négativement sur la capacité d’exportation du pays qui encaisse ainsi d’immenses pertes en devises. 

En effet, au moment où les cours mondiaux du gaz naturel ne cessent de s’envoler vers des pics vertigineux en raison des conséquences géopolitiques du conflit ukrainien et le désir ardent de l’Europe de s’émanciper de la dépendance vis-à-vis du gaz russe, l’Algérie se prive bêtement et dans des conditions totalement absurdes d’une importante capacité de production de cette précieuse énergie fossile. Algérie Part a pu confirmer au cours de ses investigations qu’au moins deux projets gaziers majeurs sont à l’arrêt depuis presque deux ans.

Il s’agit, d’abord, de Touat Gaz, un gisement de gaz naturel exploité par les deux partenaires Sonatrach et Neptune Energy qui ont mené ensemble la réalisation d’un important ouvrage industriel lequel a commencé a exporté du gaz de vente en septembre 2019. Situé dans la wilaya d »Adrar, le gisement Touat Gaz a bénéficié récemment de la la réalisation du forage de 18 puits producteurs de gaz, la construction d’une usine de traitement de gaz d’une capacité de traitement de 14,3 millions m3/jour et d’un réseau de collecte et d’expédition du gaz. Ces réalisations ont nécessité des investissements de plus de 1,5 milliard de dollars USD et le maitre-d’œuvre de ces ouvrages est l’opérateur espagnol « Tecnicas Reunidas ».

Ces investissements ont été consentis pour permettre à Touat Gaz de produire 12,8 millions m3/jour de gaz de vente, soit 4,5 milliards de m3/an. Malheureusement, aucun de ces projets n’a été concrétisé et le gisement est à l’arrêt au moment où le monde entier connait un boom gazier et recherche désespérément cette énergie incontournable pour les besoins domestiques et le développement économique. Selon nos investigations, ce projet gazier est à l’arrêt en raison de la présence d’une forte quantité de dioxyde de carbone (CO2) lors de l’extraction du gaz naturel. Des études bâclées lors du lancement du projet Touat Gaz ont relativisé la forte présence des molécules de carbone au niveau de ce gisement faussant ainsi le calcul ayant permis l’exploitation de ce projet gazier. De nouveaux réaménagements industriels sont nécessaires pour reprendre la production de Touat gaz conformément aux normes de sécurité en vigueur dans le secteur des hydrocarbures. Mais à cause de la négligence de l’actuelle administration de Sonatrach, Touat Gaz est encore et toujours paralysé et sa production gelée faisant perdre des débouchés économiques importants pour l’Algérie.

Le même constat a été dressé au niveau du gisement ZCINA se trouvant à quelques encablures de Hassi Messaoud. Il s’agit effectivement de la Zone du complexe industriel Naili Abdelhalim (ZCINA), situé à six (6) kms de Hassi Messaoud qui a connu le lancement depuis fin février 2020 d’une nouvelle station de compression et de réinjection de gaz, d’une capacité de production de 24 millions de m3 par jour. Ce projet devait permettre l’augmentation de la production du pétrole brut par l’injection du gaz traité jusqu’à 16 millions de m3/j. Elle devait permettre également le maintien de la pression du gisement du champ par la réinjection d’un volume de 8 millions m3/j de gaz de haute pression via deux pipelines. Malheureusement, ce projet est à l’arrêt en raison du même dysfonctionnement constaté à Touat Gaz et toute une production est gelée faisant perdre des revenus conséquents à l’Algérie.

Au niveau du champ gazier de Timimoun (Sud-Ouest algérien), la production qui est assurée depuis fin 2017 par Sonatrach, Total et l’espagnol Cepsa est opérationnelle uniquement à hauteur de 50 % de son potentiel en raison d’un épineux problème de torchage du gaz naturel. Il faut savoir que le torchage du gaz (« flaring » en anglais) se pratique principalement faute d’infrastructures de traitement et de transport (gazoduc ou unité de liquéfaction) qui permettraient sa commercialisation. Mais au niveau du gisement de Timimoun, des équipements adéquats manquent cruellement pour éviter l’évacuation dans l’environnement d’un gaz dangereux pour la santé humaine ainsi que pour la faune et la flore. Depuis plus d’une année, les exploitants de ce gisement tardent à se doter des équipements recommandés pour filtrer le gaz torché afin de protéger l’environnement d’une fatale pollution.

En l’absence de ces équipements, les exploitations du gisement gazier de Timimoun ont été contraints de baisser leur production de 50 % se privant ainsi d’une importante manne financière. Il est à signaler que les travaux de développement de ce champ sont en cours depuis 2017 avec le forage des puits d’exploitation et la construction de l’usine de traitement. Ce gisement comprend 37 puits reliés aux installations de collecte et de traitement qui sont raccordées au gazoduc GR5 lequel assure le transport de la production des gisements gaziers du Sud-Ouest Saharien vers le Nord.

Le blocage dont sont victimes ces 3 projets gaziers est digne d’un sabotage caractérisé qui cause un lourd préjudice financier à l’Algérie dans cette conjoncture économique internationale où une forte compétition mondiale se joue pour fournir du gaz naturel aux plus gros consommateurs mondiaux qui paient rubis sur l’ongle cette énergie fossile afin de sécuriser leurs stocks et leurs approvisionnements.

Il est à souligner en dernier que jeudi 19 mai, le Parlement européen et le Conseil – représentant les Vingt-Sept – sont parvenus à un accord jeudi sur un règlement prévoyant que les États membres remplissent leurs réserves de gaz à « au moins 80% » de leur capacité d’ici novembre. Ce niveau minimal sera porté à 90% pour les périodes hivernales suivantes, afin de garantir un approvisionnement suffisant à l’UE. Le TTF néerlandais, référence du marché du gaz naturel européen, évoluait vendredi à 89,70 euros le MWh. C’est dire que la demande mondiale sur le gaz naturel sera fortement boostée par cette décision européenne. L’Algérie en se privant de capacité de production supplémentaire se tire une balle dans le pied. La Présidence de la République va-t-elle rester silencieuse face à ce gâchis inédit ?

 

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