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mardi, mai 30, 2023

Enquête exclusive. Les tours de contrôle des aéroports algériens : des milliards dépensés pour des projets retardés et inachevés

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C’est un scandale que le ministère des Transports et les principaux responsables de l’Etablissement National de la Navigation Aérienne (ENNA) veulent étouffer à tout prix. Et pour cause, des milliards de nos deniers publics ont été dépensés pour des chantiers bâclés, inachevés, et des marchés publics attribués de manière peu honnête. Ce scandale concerne plusieurs projets d’équipements aéronautiques comme les tours de contrôle de plusieurs de nos aéroports. Explications. 

Les autorités algériennes ont consenti à débourser de grosses sommes d’argent dans des projets d’équipements aéronautique afin d’améliorer la sécurité aéronautique et augmenter les performances de plusieurs de nos aéroports. La plupart de ces projets ont été lancés depuis les années 2012 jusqu’à 2015. Les marchés les plus récents remontent à 2O17.

Malheureusement, nos investigations ont démontré que toutes  ces nouvelles infrastructures n’ont pas encore vu le jour. Et pour cause, des avenants de prorogation de délais, des avenants de travaux supplémentaires et complémentaires avec des montants exorbitants ont été accordés tout en bafouant le code des marchés publics. Au cours notre enquête, nous avons obtenu des procès verbaux de réception provisoire avec des resserves qui restent en suspens.

A titre d’exemple, nous allons plancher sur le marché concernant l’appel d’offres national et international restreint N°01/DL/2011 portant : réalisation en tous corps d’état de bloc technique et tour de contrôle pour les lots suivants :

  • Lot 1 : Aérodrome d’Alger
  • Lot 2 : Aérodrome d’Oran
  • Lot 3 : Aérodrome de Constantine
  • Lot 4 : Aérodrome de Ghardaïa
  • Lot 5 : Aérodrome de Tamanrasset

Le constructeur espagnol  FCC Construccion  SA a  bénéficié  des trois lots Alger, Oran Constantine avec les montants suivants :

Lot n°1 Alger         : 2 605 952 089, 68 DA TTC

Lot N°2 Oran         : 2 192 651 966, 93 DA TTC

Lot n°3 Constantine    : 2 267 854 040, 49 DA TTC

 

Nous avons découvert au cours de nos investigations que ces montants ont quasiment tous changé alors que ces marchés de construction de nouvelles tours aéroportuaires n’ont pas été achevés et comportent de nombreuses irrégularités ainsi que des déficiences très douteuses. Ainsi, la nouvelle tour de l’aéroport d’Alger est inscrite dans le marché 1583/DL/2012. Malgré l’énorme budget consacré à cette nouvelle tour aéroportuaire, les employés de l’ENNA ont constaté d’incroyables dysfonctionnements, à savoir les arrêts répétés des ascenseurs, des anomalies et arrêts au niveau du système de climatisation centralisé, déclenchement du système anti incendie de manière  anormal, des bugs paralysent le système de contrôle de surveillance et une pane au niveau du système anti-incendie entrainant des problèmes graves au niveau du câblage réseau énergie.

Quant à la tour d’Oran, inscrite dans le marché 1584/DL/2012, nous avons découvert au cours de nos investigations 5 avenants qui ont provoqué une augmentation vertigineuse de ce marché public jusqu’à 2.425.897.870,08  DA TTC et le nouveau délai de réalisation a été rallongé  jusqu’à 70 MOIS.

Concernant la Tour de l’aéroport de Constantine, inscrite dans le marché 1585/DL/2012,  nous avons découvert au cours de nos investigations 6 avenants qui ont conduit vers un nouveau montant de ce marché public, à savoir une surévaluation de 2.445.451.389.78  DA TTC et même le délai a été élargi jusqu’à 70 MOIS.

Il faut savoir également que le Groupement-China Geo Engineering Corp-AVIC a bénéficié  des deux lots restants GHARDAIA et TAMANRASSET pour les montants suivants

 

Lot n°4 Guardaia     :                  3 218 978 731, 82 DA TTC

Lot n°5 Tamanrasset :               2 524 750 094,44 DA TTC

Ces deux projets ont été aussi modifiés par de nouveaux avenants conséquents et les délais de réalisation encore une fois rallongés au profit du constructeur étranger. Le procédé est toujours le même : surévaluation, surcoût et donc de nouvelles dépenses en millions de Da pour des délais rallongés sans aucune explication rationnelle, voire convaincante.

 

Ces pratiques occultes entraînent des retards qui ne sont pas sans risque et peuvent provoquer des conséquences assez graves sur la sécurité des aéronefs ou aéroports algériens et donc des  passagers. Cette gestion opaque douteuse et opaque de l’ENNA de ces projets stratégiques produit des  effets négatifs sur le travail quotidien de nos contrôleurs aériens notamment au niveau des aires de mouvement surtout avec les nouveaux parkings des avions et les postes de stationnement liés à la nouvelle aérogare de l’aéroport international d’Alger qui présente, a-t-on appris auprès de plusieurs ingénieurs de l’ENNA, des zones difficilement visibles pour les contrôleurs aériens.

Des normes basiques de la sécurité aérienne sont donc bafouées par la direction générale de l’ENNA, un établissement sensible et délicat dont la gouvernance mérite de faire l’objet d’enquêtes judiciaires comme le démontrent à chaque fois nos révélations. 

Ces grosses sommes d’argent public dépensés sans aucune efficacité et contrôle sain pour les besoins de nos équipements aéroportuaires ne sont que la face visible de l’iceberg. Les retards constatés dans la mise en service de la nouvelle tour de contrôle de l’aéroport d’Alger sont en train de causer un sérieux préjudice au trafic aérien puisque les contrôleurs de l’ENNA ont été contraints de diminuer la fréquence des vols afin de pouvoir accomplir leurs missions sans exposer les passagers à des risques graves d’insécurité.

 

Suite aux contraintes vécues par les contrôleurs aérienne surtout durant la période estivale qui ne s’est pas encore achevée officiellement, une réunion a eu lieu entre les contrôleurs et le Directeur Général de l’ENNA ainsi que plusieurs autre responsables de cette structure étatique dans le but d’exposer les risques encourus dans l’exerce de leurs fonctions et pour obtenir une date précise de la mise en service de la nouvelle tour de contrôle de l’aéroport d’Alger. Les conclusions de cette réunion n’ont toujours pas été concrétisées. Et le statu-quo perdure. Algérie Part poursuit ses investigations et reviendra sur ce dossier avec de nouvelles révélations.

 

 

 

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