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jeudi, mars 28, 2024

Documents exclusifs. Les lobbys secrets du secteur de la santé en Algérie : la famille du général Abderrahim, sa société parisienne et ses prestations illicites en devises

Face la pandémie mondiale du coronavirus COVID-19, tous les Algériens sont conscients de la décrépitude profonde de leur système de santé. Mais peu d’entre eux connaissent les rouages des affaires opaques de ce secteur névralgique de l’Etat placé sous l’emprise de certains lobbys secrets qui s’enrichissent sur le dos des patients algériens. Aujourd’hui, Algérie Part vous dévoilera les pratiques illicites et immorales d’une famille qui possède un véritable monopole sur un segment entier du secteur de la Santé. Il s’agit de la famille du défunt général Kamel Abderrahim, l’ancien commandant de la 2e Région militaire à Oran sous le président de la République Chadli Bendjedid (1979-1984).

Décédé en octobre 2017, le général Kamel Abderrahim a permis à sa famille avant sa mort de jouir d’une fortune considérable, l’une des plus grosses en Algérie. Et pourtant, rien ne prédestinait ce général puissant de l’armée algérienne au monde des affaires. Les Algériens ne connaissent pas ce personnage excentrique et intrigant. Ancien commandant des forces navales jusqu’à sa retraite (1987-1988), le général Kamel Abderrahim s’est reconverti en homme d’affaires durant les années 90 et fonde l’entreprise IMC, spécialisé dans la commercialisation des produits de dialyse et pharmaceutiques.

Depuis plus de 15 ans, le monopole d’importation des équipements et consommables en hémodialyse, ces produits n’étant pas fabriqués, mais montés en Algérie, est détenu par un seul opérateur : La société INDUSTRIES MEDICO CHIRURGICAUX SARL. (IMC)

Aucune entreprise n’a pu obtenir le visa technique pour les consommables de dialyse par le ministère de la santé, comme le stipule un autre arrêté du 06/06/2005 fixant le cahier des conditions techniques à l’importation des produits pharmaceutiques destinés à la médecine humaine hormis la société IMC. Cette situation de monopole permet au Général Kamel ABDERRAHIM de fixer les prix comme il l’entend en l’absence de toute concurrence, pénalisant ainsi l’Etat et le malade à qui il impose certains produits obsolètes et abandonnés de par le monde. L’appétit du Général ne s’arrête pas là puisqu’il a, en 2003, investi le marché des cliniques de dialyse en lançant à travers la société RENADIAL un réseau de près de 25 cliniques qui lui assurent plus de 2500 patients !

Grâce ses business, le général Abderrahim a offert à sa famille un monopole quasi-général sur un marché de plus de 500 millions d’euros en Algérie. Qui dit mieux ! Après la disparition du général Kamel Abderrahim en 2017, ce sont ses enfants qui ont hérité d’un empire prospère. C’est, surtout, son fils Nadir Abderrahim qui a repris le flambeau en tentant de conserver le monopole et les privilèges de sa famille.

Depuis 2017, Algérie Part a été le seul média algérien qui avait osé enquêter et faire des révélations sur les affaires sombres et illicites de cette puissante famille. Aujourd’hui, nos investigations ont permis de découvrir que la famille Abderrahim renforçait son empire en Algérie depuis une société créée à Paris en France et à travers laquelle elle se facturait des opérations d’importation en devises sonnantes et trébuchantes.

Cette société s’appelle la SARL « GenoTech » basée au 55, avenue Marceau à Paris comme le démontrent les documents exclusifs obtenus au cours de nos investigations. Presque tous les actionnaires de cette société française sont issus de la famille Abderrahim dont notamment le fils du général Kamel Abderrahim, Nadir Abderrahim. Cette société est officiellement spécialisée dans l’achat, la vente, distribution des médicaments, produits et équipements médicaux, paramédicaux, pharmaceutiques et parapharmaceutiques. Elle développe également des activités d’importation et exportation de tous ces produits. Comme par hasard, la famille Abderrahim exerce la même activité en Algérie.

Mieux encore, la famille Abderrahim utilise la SARL « GenoTech », fondée en 2011, pour exporter vers l’Algérie et fournir des produits pharmaceutiques à sa… société algérienne IMC ! A titre d’exemple, les lignes à sang pour hémodialyse sont commercialisées par IMC en Algérie grâce aux fournitures qui lui sont facturées en devises par… GenoTech. En clair, depuis 2011, la famille Abderrahim s’adonne à la facturation de prestations en devises entre deux sociétés dont elle le premier propriétaire. Il s’agit d’une pratique totalement illicite et immorale car les prestations entre deux sociétés ayant un dirigeant ou actionnaire commun, peuvent se révéler être un exercice délicat qui permet de transférer secrètement et illicitement des devises depuis l’Algérie vers l’étranger sous couvert d’importations de produits médicaux et pharmaceutiques.

Il y a, en plus, le risque d’abus de bien sociaux car en réalité, Nadir Abderrahim et les autres associés ou dirigeants communs à GenoTech et IMC ont utilisé à des fins personnelles des éléments d’actifs d’une société nationale algérienne en passant par une  « société écran » basée à l’étranger, en l’occurence à Paris en France.

Les opérations d’importation financées par les banques algériennes au profit de la société IMC ont servi à acheter des produits commercialisés par GenoTech. L’argent circule entre les mêmes actionnaires et les mêmes dirigeants. Et ces derniers peuvent facilement déduire des charges fictives et facturer l’accomplissement de prestations jamais intervenues. Seul un contrôle des services fiscaux algériens et français peuvent déterminer les circonstances dans lesquelles la famille Abderrahim gérait leurs deux sociétés algérienne et française.

Il est à noter enfin que malgré le Hirak, la chute du régime Bouteflika et l’enclenchement d’une soi-disant lutte acharnée contre la corruption et la dilapidation des deniers publics, ni la justice ni les services de sécurité n’ont inquiété un jour la famille Abderrahim qui continue d’exercer son monopole sur un marché de plus de 500 millions d’euros en Algérie. Elle continue de se facturer à elle-même des prestations d’importation en devises prenant ainsi le loisir de surfacturer facilement ses produits achetés en France et en Europe pour les revendre en Algérie. Un mécanisme qui permet d’amasser des fortunes en devises dans les banques européennes ou françaises. Le calvaire des patients algériens est, malheureusement, une opportunité de business pour les lobbys du secteur de la Santé.

    

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