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jeudi, avril 25, 2024

Des compétences méprisées, des grands projets paralysés : situation chaotique au sein du groupe Sonelgaz

La culture de l’instabilité semble avoir été adoptée comme mode de gouvernance par le groupe public de production et de distribution d’électricité et de gaz SONELGAZ depuis plusieurs années. Une instabilité chronique confirmée par le dernier rapport accablant de l’Inspection Générale des Finances (IGF), qui a mené un audit approfondi sur la filiale d’engineering des grands ouvrages énergétiques CEEG. En effet, CEEG a vu défiler pas moins de six PDG en moins de quatre ans, dont le dernier en date, Yazid DJELLOULI, qui a été nommé à ce poste le 23 avril 2023, lui-même retraitable dans quelques mois.


Cependant, ces changements chroniques ne semblent pas être problématiques pour le nouveau PDG de SONELGAZ, Mourad ADJAL, qui, depuis sa prise de fonction le 30/12/2021 a initié des transformations majeures dans la structure organique de ce géant énergétique. Néanmoins, ces changements ont été apportés sans qu’aucune étude prospective sérieuse n’ait été menée ni qu’une réflexion pertinente sur la gestion du changement n’ait été entreprise par ce dernier, pour identifier les enjeux et se doter des outils nécessaires à la réussite de ces mutations profondes.

Un cadre supérieur du groupe nous a expliqué : « Un changement trop rapide au sein d’une entreprise de la taille de SONELGAZ peut être comparé à un virage trop brusque d’un gros navire en pleine mer. Si ce navire effectue un virage trop serré, les passagers risquent d’être projetés à l’eau et le navire lui-même pourrait être endommagé. De même, une grande entreprise qui tente de changer rapidement peut mettre en péril non seulement sa structure mais aussi désorienter tout son écosystème ». En effet, une étude approfondie et exhaustive a été commandée par SONELGAZ auprès du grand cabinet londonien Ernst and Young (EY), qui a proposé des réformes organisationnelles pertinentes pour l’optimisation et la consolidation des ressources du groupe, tenant compte de ses forces, de ses faiblesses et des défis futurs auxquels SONELGAZ devrait faire face pour son développement et son adaptation aux enjeux futurs, sans pour autant omettre son ADN d’entreprise citoyenne et de service public par excellence. Malheureusement, le narcissisme connu et reconnu de l’actuel PDG du groupe a fait que les recommandations de cet audit pluriannuel, et qui a coûté plusieurs millions de dollars à SONELGAZ, a été censuré sans la moindre explication, dans le seul but d’effacer toute trace de ses prédécesseurs, aussi pertinente soit-elle. Suite à cela, Mourad ADJAL a procédé à un changement anarchique, créant un chaos total et une désorientation indescriptible au sein du groupe en ramenant le nombre de filiales de 34 à 14, sans tenir compte des spécificités des métiers ni des missions de chacune d’entre elles. Des filiales entières ont tout simplement été sacrifiées et les employés limogés, sous une illusion d’opération de fusion-acquisition. Il est important de rappeler que les entreprises en question étaient florissantes avant l’opération de réintégration au groupe en SONELGAZ dans les années 2000, cédées au Dinars symbolique par l’état, à l’instar de KANAGHAZ, INERGA, ETTERKIB…

Les cadres supérieurs du groupe sont dans une situation de confusion et de frustration, confrontés à des changements fréquents de postes et de sièges sociaux qui semblent être basés davantage sur la loyauté et la soumission que sur la compétence et l’expérience. De nombreux cadres promus récemment aux postes de responsabilité proviennent de la filiale distribution, dont est lui-même issu Mr ADJAL. En revanche, les cadres issus des secteurs de l’engineering, de l’exploitation et des travaux sont soumis aux caprices et aux foudres du PRESIDENT pour le moindre comportement jugé inadéquat.


Des témoignages font état de pratiques inquiétantes et invraisemblables, comme celle d’un cadre dirigeant connu par sa compétence et son dévouement qui a occupé le poste de Directeur de la région ouest au sein de la filiale d’exploitation SPE. Après plus de 25 ans de loyaux services, il a subi une véritable humiliation en étant dégradé et mis au placard par le PRESIDENT pour la simple et unique raison qu’il l’a croisé dans une supérette d’Alger, un jour de week-end n’étant pas d’astreinte, faisant ses courses pour sa famille résidant à Alger. Une situation abracadabrante selon son collègue, qui nous rapporté les faits. Un autre employé a également témoigné des pratiques autoritaires de la nouvelle direction de SONELGAZ, affirmant qu’il avait été contraint de changer de filiales et donc de lieu de travail à trois reprises en six mois, passant de Kahrif à Kahraghaz puis à STE, sans aucune considération pour son lieu de résidence ou son champ d’expertise, et sans même être consulté.

Ces pratiques sont source de démotivation et de mécontentement parmi les cadres du groupe, qui sont en proie à l’incertitude et au stress permanent. Les changements de postes et de sièges sociaux ne devraient pas être utilisés comme un moyen de contrôle ou de récompense arbitraire, mais plutôt comme un moyen de favoriser l’évolution professionnelle et le développement des compétences des employés. Il est temps pour la direction du groupe de revoir ses pratiques et de placer la compétence et l’expérience au cœur de ses décisions.

La situation chaotique qui règne au sein du groupe est telle qu’elle a engendré une paralysie totale des projets pour lesquels des milliards de dollars d’argent public ont été investis par l’État. L’instabilité et la peur des dirigeants de prendre des décisions engageantes, sous peine de représailles, est en grande partie responsable de cette situation. Les projets de postes de transformations qui ont été retirés de CEEG et confiés aux Sociétés de Distributions ne voient plus le jour, de même que la majorité des grandes centrales électriques, telles que celles de Hassi R’Mel, Aïn-Ouessara, Kaïs, Mostaganem, Oumache3 et bien d’autres installations.

Cette paralysie totale est une source de préoccupation pour les experts en énergie, d’autant plus que ces projets nécessitent des investissements colossaux pour leur parachèvement. Ces situations de blocage vont certainement générer encore des pertes substantielles, notamment en raison des conflits et des arbitrages internationaux à gérer avec les constructeurs en charge de ces projets. Cette paralysie des projets ne peut que renforcer l’inquiétude des entreprises, des employés et de tous ceux qui s’intéressent au secteur énergétique Algérien.
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