Les images parlent d’elles-mêmes. Dimanche, en fin de journée, à leur sortie de la prison d’El-Harrach à Alger, le comédien Kamel Bouakaz, l’ancien joueur de l’équipe nationale de football Fodil Dob et Houari Boukhors, le frère du cyber-activiste Amir Dz, ont été accueillis triomphalement en présence d’une foule nombreuse qui scandait des slogans en faveur de la liberté et de la dignité.
Kamel Bouakaz et ses codétenus ne sont, certes, pas des opposants politiques, des militants engagés ou des politiciens patentés, mais ces trois personnes ont incarné à leur corps défendant l’inacceptable arbitraire qui viole les principes élémentaires du droit pour emprisonner des citoyens sans bénéficier d’un procès équitable.
Un emprisonnement abusif basé sur des considérations politiques et appuyé par une campagne de lynchage médiatique unique en son genre dirigée par la télévision Ennahar TV. De nombreuses dispositions juridiques ont été violées, bafouées. Tout comme dans l’affaire des journalistes d’Algérie Part Abdou Semmar, Merouane Boudiab ou le directeur du site Dzaïrpresse, Adlène Mellah.
Placés en détention, présentés devant les caméras comme des vulgaires criminels, ces personnalités ont été victimes d’une inédite machination destinée à broyer les libertés publiques au nom de la raison politique.
Après plusieurs semaines à la prison d’El-Harrach, ces journalistes, artistes ou personnalités sportives ont été libérées grâce à une incroyable mobilisation citoyenne. Rassemblements, plaidoiries des avocats, multiples interventions des journalistes sur les médias, marches citoyennes, organisation d’un comité citoyen de défense des libertés civiques, etc., la mobilisation a fini par porter ses fruits. Tout le monde a été relâché même s’il s’agit d’une « libération provisoire ».
Dans l’affaire de Kamel Bouakaz, Adlène Mellah, Fodil Dob et Houari Boukhors, une prouesse judiciaire a été véritablement accomplie : les procédures de l’instruction ont été accélérées en quelques semaines alors que d’habitude, elles s’étalent sur un délai minimal de 8 mois ! Cela signifie que ces personnes auraient pu croupir encore à la prison d’El-Harrach durant toute cette période.
Dieu merci, la mobilisation sur le terrain et les pressions des avocats, journalistes, artistes rassemblés autour d’une seule cause ont fini par contraindre la justice à redonner à ces personnes détenus arbitrairement leurs droits. Les délits pour lesquels ils étaient poursuivis ne méritent en aucun cas l’emprisonnement.
Mais combien d’Algériens ordinaires sont encore en détention alors qu’ils n’ont même pas été encore jugés et leur culpabilité n’a même pas été encore démontrée ? Ces algériens anonymes, méconnus de l’opinion publique, méritent également cet élan de solidarité. Cela prouve enfin que la mobilisation citoyenne est plus jamais nécessaire pour défendre les libertés publiques de tous les algériens.