L’adoption des réformes politiques et l’application de nouvelles lois nécessite l’indépendance du système judiciaire. Cependant ce n’est toujours pas le cas en Algérie. Le système juridique algérien demeure dépendant du gouvernement. Bien que la constitution algérienne exige l’indépendance du système judiciaire, le président possède un pouvoir majoritaire sur ce système.
En effet, le chef de l’état désigne le président du conseil constitutionnel, préside le conseil
supérieur de la magistrature, désigne les magistrats et peut utiliser des sanctions disciplinaires à leur encontre. A ce facteur négatif s’ajoute l’impunité des crimes. Les réformes devaient se baser sur l’impartialité du système judiciaire et un système de sanction pour tous les crimes.
Certains facteurs entravent l’impartialité et l’indépendance de ce système. En l’absence d’un juge indépendant, par exemple, il ne peut y avoir d’application correcte et légale des droits et des libertés. On peut ainsi citer quelques uns de ces facteurs :
Les limites du contrôle constitutionnel :
Le conseil constitutionnel a pour fonction de veiller au respect de la constitution et à la
régularité des élections nationales et des référendums. En Algérie, le manque d’autonomie du conseil constitutionnel l’empêche de remplir pleinement son rôle. Le pouvoir du conseil
constitutionnel est très restreint. Il ne peut pas procéder à l’annulation des dispositions ou des décrets qui violent la constitution.
Dans ce sens, l’autorité du décret est inférieur à celle d’une loi. En d’autres termes, si la loi
contredit le décret celui-ci ne pourra pas être appliqué.
Les lacunes de la formation des magistrats :
La commission nationale de la réforme a remis en cause le processus de formation des
magistrats. L’enseignement des futurs magistrats s’avère générale sans spécialisation.
La formation basique dans les facultés de droit et dans l’institut nationale de la magistrature manque d’un bon encadrement.
La formation aux droits de l’homme –élément essentiel de l’impartialité et de l’indépendance du système judiciaire- est complètement négligée. Sans aucune formation des droits de l’homme, les conventions internationales concernant ce droit peuvent être incomprises et inapplicables. De plus, la formation des magistrats ne compte pas une charte de déontologie.
Les interférences dans la carrière des magistrats :
Le conseil supérieur de la magistrature (CSM) a pour rôle de garantir l’indépendance des magistrats par rapport au pouvoir exécutif. C’est la composition du CSM qui permet de déterminer le degré d’indépendance du système judiciaire. Ainsi lorsque le nombre des magistrats du siège élus par leur pair est majoritaire et que les décisions de promotion, sanction ou nomination sont approprié à l’avis du CSM, les magistrats bénéficient d’une indépendance et d’une protection contre les ingérences du gouvernement.
Malheureusement en Algérie la loi du 6/09/2004 qui est venu compléter la loi du 12/12/1989 constitue une régression de la loi précédente concernant la composition du CSM et donc son autonomie. A titre d’exemple dans cette nouvelle loi le nombre des magistrats du siège est similaire à celui du parquet, sachant que les magistrats du parquet sont directement sous l’autorité du ministre de la justice donc du pouvoir exécutif (premier ministre et/ou le président de la république).
Un constat négatif des nouvelles réformes de 2012 :
Les lois promulguées en janvier 2012 comportent plusieurs restrictions. Elles sont en
contradiction avec la démocratie et les libertés individuelles. Elles renforcent le caractère autoritaire du régime politique.
La loi n°12-01 relative au régime électoral est venue modifier et compléter la loi n°97-07 du 6 mars 1997. Cette nouvelle loi est censée renforcer la transparence des élections.
En réalité, les nouvelles dispositions ne fournissent aucun changement fondamental par rapports aux textes antérieurs et ne garantissent pas le déroulement des élections en toute transparence. En effet, cette loi ne prévoit même pas la création d’une instance de surveillance des élections bénéficiant d’une indépendance complète.
De plus avec le manque d’indépendance du système juridique, le rôle de cette instance dans le contrôle du processus électoral reste très limité.
En Tunisie par exemple, la loi du 18/04/2011 n°2011-27 a permis la création d’une instance supérieure indépendante pour les élections (ISIE) qui est réellement indépendante des institutions de l’état et des partis politiques. Elle bénéficie d’un budget et d’une structure qui garantissent son autonomie.
La création d’association, de publications ou d’un parti politique deviennent plus complexes dans la nouvelle disposition. On va donner quelques exemples :
Le droit des associations nécessite parfois une double autorisation : de la part du ministre de l’intérieur et du ministre des affaires étrangères (lorsqu’il s’agit d’une association étrangère). Alors qu’en principe les citoyens ont le droit de créer des associations indépendantes du gouvernement sans autorisation préalable. Cette loi est une atteinte à la liberté citoyenne les lois concernant les associations et les partis politiques ont bénéficié de nouvelles conditions de dissolution.
Ainsi, une ONG peut être dissoute dans le cas où elle reçoit des financements d’ONG étrangères. Pire encore, une ONG peut être démise de ses fonctions en cas d’immixtion
dans les affaires internes de l’état. Dans la loi précédente, une ONG peut être dissoute après une décision de justice. Alors que dans la nouvelle, une simple décision administrative suffit à suspendre une ONG.
On constate donc que les nouvelles dispositions interdisent clairement aux membres d’une ONG de traiter des sujets qui concernent leur propre pays. C’est une remise en cause de l’identité même et du rôle de la société civile. Ces dispositions découragent la création de sociétés civiles qui peuvent jouer un rôle prépondérant dans l’amélioration des conditions de vie pour les citoyens, renforcer leur liberté et instaurer une vraie démocratie.
Par Khendek Samira, diplômé de l’université Abou Bekr Belkaid de Tlemcen