La visite de la chancelière allemande Madame Angela Merkel suite à l’invitation du Président de la République, Abdelaziz BOUTEFLIKA, s’inscrit, certes, dans le cadre du renforcement de la stratégie allemande en direction de l’Afrique, de la coopération économique algéro-allemande mais s’articule également autour lutte contre le terrorisme et les flux migratoires vers l’Europe.
Première économie de l’Union européenne, l’Allemagne est un État fédéral composé de 16 Länder et s’étend sur une superficie de 357 027 km² pour une population d’environ 82,5 millions d’habitants (mars 2017) avec une population étrangère de plus de 9 millions .Pour 2017, le produit intérieur brut est estimé à : 3263 milliards d’euros avec une croissance de 2,2%, le PIB par habitant de 39.454 euros et les principaux secteurs d ‘activité sont : services à très haute technologie (69%) ; industrie (30,4%) ; agriculture (0,6%). Le taux de chômage a été de 5,7% (février 2018) et en moyenne pour 2017 le taux d’inflation a été de 1,8%.
Sur le plan de l’équilibre de la balance commerciale, la balance commerciale les exportations pour 2017 ont été de 1279 milliards d’euros et les importations de 1034 milliards). Les principaux clients sont : Etats-Unis (8,7%) ; France(8,2%) ; Chine(6,7%) ; Pays-Bas(6,7%) ; Royaume-Uni (6,6%) et les principaux fournisseurs: Chine (9,7%), Pays-Bas (8,8%), France (6,1 %), Etats-Unis (5,9%), Italie (5,4 %).
L’Allemagne étant la première puissance économique de l’Europe, dans le domaine international, elle entend se donner une place à la mesure de son poids économique et de son influence politique. entend s’engager davantage en Afrique afin de juguler le risque terroriste et la crise migratoire Au-delà des questions politiques et sécuritaires, le maintien d’importants liens économiques, notamment sur le volet « aide au développement » et aide humanitaire, et commerciaux, bien que l’Afrique ne représente encore que 2% du commerce extérieur allemand, est un élément déterminant de la relation de Berlin avec le continent.
Les exportations vers l’Allemagne sont dérisoires : à peine 498 millions de dollars en 2011, 238 en 2012, 317 en 2014 et selon certaines sources, nos exportations n’ont jamais dépassé les 200 millions de dollars en 2017. Si l’on tient compte des 3,21 de dollars d’importation, nous aurons un montant global pour 2017 d’environ 3,4 milliards de dollars avec un fort déséquilibre commercial comme pour la Chine en défaveur de l’Algérie. Par ailleurs Selon le site de la radio allemande Deutsche Welle (DW), l’Algérie arrive en tête des importateurs d’armes allemandes en 2017 avec 1,36 milliard d’euros, soit 1,56 milliard de dollars au cours de 1,15 dollar un euro.
D’une manière générale, l’Algérie importe essentiellement de ce pays des équipements mécaniques, électriques, sidérurgiques, des véhicules, (ayant assisté récemment à l’installation d’une unité de montage), et des produits chimiques et des graisses. Les exportations algériennes sont, à l’inverse, constituées essentiellement des hydrocarbures (pétrole et gaz) et dérivés. Selon plusieurs études réalisées en Allemagne, plusieurs centaines de sociétés d’Outre- Rhin sont implantées en Algérie.
Elles évoluent dans différents secteurs d’activité entre autres l’énergie, les services, l’hydraulique, le transport et les technologies de la construction. Mais certaines entreprises allemandes ont beaucoup de difficultés à pénétrer le marché algérien, en raison des lourdeurs bureaucratiques, plusieurs étapes à franchir. Malgré ces difficultés, il y a beaucoup d’entreprises allemandes qui sont installées en Algérie, notamment dans la mécanique, les produits de haute technologie et les énergies renouvelables.
En plus des difficultés administratives, selon les autorités allemande, leurs opérateurs rencontreraient aussi des problèmes avec le secteur financier, comme les banques où l’interdiction de transfert une partie des revenus à l’étranger est monnaie courante. La règle du 49/51% généralisée à tous les secteurs, pouvant imaginer une minorité de blocage, régissant le code des investissements étrangers en Algérie constitue selon les allemands un frein pour les entreprises étrangères, surtout les PMI/PME innovantes désireuses d’investir.
Les pays de l’Union Européenne sont toujours les principaux partenaires de l’Algérie, avec les proportions respectives de 44,03% des importations et de 58,37% des exportations. Les principaux clients sont par ordre décroissant Italie 5,51 milliards de dollars ( 15,96%), France 4,46 ( 12,92%)-Espagne 4,14(11,91%)- USA 3,39 (9,76%)-Brésil 2,08 (5,99%)Turquie 1,96 (5,64%)-Pays Bas 1,84 (5,32%) et la Chine très loin avec un montant dérisoire de 695 millions de dollars Les principaux fournisseurs sont la chine 8,30 milliards de dollars (18,08%).
La France 4,29 ( 9,35%), l’Italie 3,75 (8,17%), l’Allemagne 3,21 (7,00%), l’Espagne 3,12 (6,81%)la Turquie 1,99 (4,35%)- les USA 1,81 (3,95%).Aussi les échanges entre l’Algérie et l’Allemagne sont loin des potentialités malgré la volonté politique « partagée » par les deux capitales de renforcer au les échanges économiques et la coopération bilatérale dans plusieurs secteurs porteurs.
Les Allemands privilégiant le pragmatisme ont une vision stratégique, l’Algérie pouvant leur servir de porte de l’Afrique et par son développement au sein d’une intégration de l’Afrique du Nord favoriser le co-développement dans la région et atténuer les flux migratoires.
Pour un bon partenariat gagnant-gagnant, il appartient aux Algériens de lever les obstacles, supposant de profondes réformes structurelles, une bonne gouvernance et une visibilité et cohérence de la politique socio- économique car il faut être réaliste, l’Allemagne est la première économie de l’Union européenne, le PIB de l’Algérie en termes réel a été d’environ 160 milliards de dollars en 2017 contre 3750 milliards de dollars pour l’Allemagne (23 fois plus élevé que celui de l’Algérie) et les hydrocarbures représentant l’essentiel de nos exportations de 34,76 en 2017 alors que l’Allemagne a exporté pour 1470 milliards de dollars selon un taux de change fixant 1,15 dollar pour un euro. Les exportations allemandes représentent ainsi l’équivalent de 43 fois le volume de des exportations algériennes !
L’Algérie étant principalement exportateur d’hydrocarbures, il faut être également conscient que l’Allemagne peut s’approvisionner en pétrole et gaz de la Russie à travers les canalisations déjà opérationnelles. En bref, dans la pratique des affaires, il n’y a pas de places pour les sentiments. Il s’agit uniquement des intérêts. L’Algérie jouit du statut stratégique de pays clé de la région méditerranéenne et africaine, il serait fortement dommageable que nos autorités ne tirent pas le meilleur de la visite de la chancelière Angela Merkel.
Par le Professeur des universités et expert international : Abderrahmane MEBTOUL